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Transports. Les Assises nationales de la mobilité en Essonne

Dans le but de présenter au Parlement une loi d’orientation des mobilités en janvier 2018, le ministère de la Transition énergétique et solidaire organise des réunions dans les départements durant les mois d’octobre et de novembre 2017. Celle de l’Essonne était convoquée le lundi 6 novembre 2017 à la Préfecture, à Évry, sous la forme d’un « Atelier territorial » dont le thème était « Mobilité plus solidaires et mobilités plus intermodales ».

Gare SNCF de Juvisy-sur-Orge. Lignes du Transilien RER C et RER D, 3 juin 2017. © Photographie CAD/BM pour PEE.

Comme souvent dans les opérations up-down des exécutifs gouvernementaux et des administrations départementales  en direction des citoyens, l’objectif annoncé est tellement général, si faussement consensuel, et à ce point polycentrique, que personne ne peut être contre.

D’ailleurs, les conclusions de l’atelier territorial étaient annoncées avant même que l’atelier ne se tienne le 6 novembre 2017. Dès le 23 octobre 2017, on pouvait lire une note de présentation dont le verbe était au futur :

« l’atelier permettra de dégager des pistes d’amélioration, des priorités, des préconisations et des innovations sur deux thèmes :

  • des mobilités plus solidaires : réduire les factures sociales et territoriales,
  • des mobilités plus intermodales : mieux articuler toutes les offres de transport ».

Les conclusions de cet « atelier participatif » étaient donc tirées avant qu’il ait eu lieu : un sujet de méditation pour les historiens du futur.

« Assises nationales de la mobilité. Atelier territorial en Essonne : mobilités plus solidaires et mobilités plus intermodales ». Note de présentation de la Préfecture de l’Essonne, 23 octobre 2017, 1 p.

Y a-t-il un seul habitant du département de l’Essonne susceptible d’être en désaccord avec des objectifs comme « Réduire les factures sociales et territoriales » et « Mieux articuler toutes les offres de transport » ? Pas un seul : tout le monde est d’accord sur de tels énoncés, tellement  généraux qu’il en perdent tout sens.

En revanche, les habitants de nos communes voudraient avoir des réponses à quelques questions précises sur les mobilités. Quelques exemples.

  • Pourquoi la gare SNCF de Savigny-sur-Orge était-elle fermé le samedi 4 novembre 2017 matin, sans qu’aucune raison ne soit affichée sur la porte ?
  • Pourquoi autant de trains du RER C entre Paris et Juvisy-sur-Orge / Brétigny-sur-Orge / Dourdan sont-ils annulé tous les jours ?
  • Pourquoi le chantier du Tam-Train Evry-Massy semble être complétement arrêté depuis le printemps 2017 ? L’achèvement est-il toujours prévu pour 2020 ?
  • Quelles seront les conditions de déplacement entre Versailles et Paris lorsque les trains SIM DU RER C auront été supprimés ?

L’étonnant concept de « mobilité urbaine durable ». Aucun concept servant à « problématiser » la réalité que nous vivons n’est évident. Ils sont tous construits et apparaissent à un moment donné dans une tension entre ceux qui exercent le pouvoir de décider et ceux qui ont le pouvoir d’obéir. Demandons-nous ici pourquoi remplacer le concept de « transport » est-il remplacé par celui de « mobilité » ? Pourquoi cette substitution se produit dans l’indifférence ? Quelles conséquences produisent-elles à l’égard non de la forme, mais à celui du fonds du dossier ?

Le concept de « mobilité durable » semble être apparu dans les années 1990 comme une façon « de renouveler la perspective classique du transport durable » nous indiquent Éric CHAMPAGNE et Paula NEGRON-POBLETE. (1) C’est un concept-valise qui contient tout à la fois la montée des problèmes de congestion routière, l’augmentation des prix du pétrole et de la croissance continue des émissions de carbone, le vieillissement de la population et les questions d’accessibilité, d’exclusion et d’inclusion dus à la dispersion spatiale dues aux inégalités sociales, ont contribué à questionner les paradigmes actuels du transport urbain.

L’usage du concept suggère à la fois :

  • un modèle de déplacement des individus habitant un territoire
  • une recherche d’optimisation de l’usage de tous les modes de transport possibles et imaginables, présents ou à-venir, qu’il s’agisse :
    • de modes de transport collectif : trains, tramway, métro, autobus, taxi, covoiturage…
    • de modes de transport individuel : voitures, deux-roues motorisés, vélo, trottinette, gyropode, et bien sûr, marche à pied.
  • une réflexion sur « les comportements de mobilité »,
    • l’évolution des conditions socio-économiques et les parcours de vie des gens.
    • les stratégies de localisation et de moyens de déplacement des individus et des ménages en fonction de leurs conditions socio-économiques, de leurs valeurs, de leurs situations familiales et
    • de la période d’entrée et de sortie dans la vie active sont au cœur de l’analyse de la mobilité.

« La pratique de la mobilité durable implique donc de tenir compte du « capital de mobilité » de chaque personne habitant un territoire ainsi que d’une planification urbaine et régionale qui intègre à la fois l’aménagement du territoire et la gestion des transports urbains ».

Enfin l’optimisation des moyens de déplacement du concept incite à une réflexion sur ce que l’on désigne comme des « comportements de mobilité »,

  • l’évolution des conditions socio-économiques et les parcours de vie des gens.
  • les stratégies de localisation et de moyens de déplacement des individus et des ménages en fonction de leurs conditions socio-économiques, de leurs valeurs, de leurs situations familiales et
  • la période d’entrée et de sortie dans la vie active.

Nous sommes bien loin des préoccupations quotidiennes des usagers des services publics de transports : le changement de concept permet de diluer, de dissoudre et de faire disparaitre toute revendication citoyenne en matière de conditions de déplacement.


DOCUMENT

PRÉSENTATION DES ASSISES DE LA MOBILITÉ

« Face à l’urgence climatique, nos modèles de production, de consommation, de déplacements doivent être profondément repensés afin d’accomplir l’indispensable transition énergétique.

Alors que les transports représentent un tiers de nos émissions de gaz à effet de serre, j’ai souhaité en faire un des enjeux primordiaux du Plan climat, avec notamment l’objectif d’atteindre la fin de la vente de véhicules thermiques d’ici 2040.

Notre pays doit s’engager pleinement dans une mobilité plus propre et durable. Je souhaite que ces Assises nationales de la mobilité permettent de lancer cette dynamique, en associant tous les acteurs qui peuvent faire bouger les lignes, au premier plan desquels les citoyens eux-mêmes qui, partout dans nos territoires, attendent de nouvelles réponses pour leur mobilité ».

Nicolas Hulot
Ministre d’État, Ministre de la Transition écologique et solidaire

« Chacun peut en faire le constat dans son quotidien, on ne se déplace déjà plus aujourd’hui comme on le faisait hier, et que dire de demain. La mobilité est en train de se transformer, et il nous faut imaginer une nouvelle politique de mobilité pour notre pays.

J’ai donc décidé de lancer des Assises nationales de la mobilité, une grande démarche participative pour que chacun – citoyen, acteur de la mobilité, élu de terrain – puisse exprimer quelles sont ses attentes, ses propositions et ses idées.

Cette grande concertation sera le socle de la future loi d’orientation des mobilités que je présenterai au début de l’année 2018. Les Assises nationales de la mobilité sont ainsi la première page de la politique que nous allons écrire pour la mobilité de demain. Je compte sur chacun pour y contribuer ».

Élisabeth Borne
Ministre chargée des Transports

RÉFÉRENCE
Ministère de la Transition écologique et solidaire, « Les assises de la mobilité », https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/dossier-presse-assises-nationales-mobilite.


L’espace n’est pas un invariant : la véritable mesure de la distance dépend de la vitesse de déplacement des hommes. Cette idée figure dans un développement du chapitre intitulé « La distance, une mesure qui varie » dans le livre L’identité de la France de l’historien Fernand BRAUDEL (1902-1985). Il est intéressant de noter que c’est par une citation empruntée à cet ouvrage qu’Édouard PHILIPPE, premier ministre, commence son allocution portant sur les politiques publiques en matière de déplacement et de transports.

Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT

 

OUVERTURE DES ASSISES DE LA MOBILITÉ
Discours de M. Édouard PHILIPPE, Premier ministre
Ouverture des Assises de la mobilité
Palais Brongniart, mardi 19 septembre 2017

Mesdames et messieurs les ministres,
Mesdames et messieurs les présidents d’exécutifs locaux,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Messieurs les présidents,
Mesdames et messieurs,

L’évènement se déroule en 1557. Le 10 août exactement, à Saint-Quentin dans l’Aisne. Ce jour-là, le roi d’Espagne Philippe II inflige une sévère défaite au connétable de Montmorency. Le père de Philippe II, le vieil empereur Charles Quint qui vit retiré, exulte. Son fils va réussir là où il a échoué. La route de Paris est ouverte. Après tout, seuls 180 kilomètres séparent Saint-Quentin de la capitale française. Que croyez-vous qu’il se passe ? Rien. Il ne se passe rien. Sans qu’il soit nécessaire de tirer un seul coup de canon, les troupes de Philippe II battent en retraite.

Le nom de cet adversaire redoutable qui a fait plier le plus puissant prince d’Europe ? L’état des routes.

L’anecdote est de Fernand Braudel. Elle figure au chapitre III de son livre L’identité de la France. Le chapitre s’intitule « La distance, une mesure qui varie ». Il commence surtout par ces quelques phrases. Vous me permettrez de les citer. Elles me semblent assez bien résumer l’histoire des transports français et la question qui nous réunit ici. Braudel écrit : « Jusqu’ici, j’ai considéré l’espace comme un invariant. Or, il varie évidemment, la véritable mesure de la distance étant la vitesse de déplacement des hommes. Hier, leur lenteur était telle que l’espace emprisonnait, isolait. La France hexagonale (…) était encore un espace immense, qui n’en finissait pas de dérouler ses routes et ses obstacles ».

Il en a fallu de l’énergie, du savoir-faire, de l’ingéniosité, des efforts pour venir à bout de « cet espace immense » et de ces « obstacles ». Je pense à vos lointains prédécesseurs – je m’adresse là aux professionnels des travaux publics-, qui ont accompli la « révolution des routes » de la période 1765-1780, avec notamment la création de l’Ecole royale des Ponts et Chaussées, plus vieille école d’ingénieurs du monde. Je pense à la révolution du rail et du charbon, à celles des autoroutes et du T.G.V. Nous venons d’inaugurer deux nouvelles lignes à grande vitesse. Une troisième est en cours de finalisation. Je connais peu d’évènements capables de susciter encore aujourd’hui autant d’émerveillement et disons-le franchement, de fierté. Cette émotion survient aussi quand on inaugure une nouvelle station de métro, un nouveau parcours pour le Tramway. C’est une fierté qui rejaillit, légitimement d’ailleurs, sur ces grands services publics du transport que sont la SNCF et la RATP. Des opérateurs qui exportent aujourd’hui, avec succès, leur savoir-faire et qui se montrent conquérants sur les marchés internationaux.

Ces infrastructures, il fallait les faire. Il fallait les planifier, les financer, les construire. Nous sommes tous heureux je crois, de disposer du réseau routier extrêmement dense et du 2ème réseau ferroviaire d’Europe. Il fallait aussi organiser l’utilisation de ces infrastructures. Une mission que la loi d’organisation des transports intérieurs (LOTI) du 30 décembre 1982 a accomplie, je crois, avec efficacité. On aurait pu continuer à en prévoir de nouvelles, du moins sur le papier, sans trop se poser de questions. C’est toujours agréable de ne pas se poser de questions. Mais cela n’a qu’un temps.

Trente-cinq ans après la LOTI, le temps nous a semblé venu de réfléchir de manière à la fois très ouverte et très organisée, à l’avenir des transports français. Et de nous poser au fond la seule question qui vaille lorsqu’on est un responsable public, national comme local : de quels transports les Français auront-ils besoin d’ici 10 à 20 ans ? Quelles sont les urgences à traiter ; les points noirs à résorber ; les inégalités à corriger, les nouveaux services à prévoir, en lien avec l’évolution du pays et de ses territoires ? Derrière cette question, très concrète, s’en cache une autre, plus stratégique, qui est celle de l’organisation, de l’architecture et du financement des transports en France.

Les besoins auxquels je veux que l’on s’intéresse aujourd’hui sont ceux de la mobilité quotidienne des Français. Quels sont-ils ? Certains sont nouveaux ; d’autres plus anciens. Ils ont un point commun : ils sont tous criants. J’en vois au moins trois. Sans doute y-en-a-t-il d’autres. Ce sera justement un des objectifs de ces Assises d’en dresser la liste de manière très précise.

Le premier besoin va vous paraître peut-être évident, mais pour moi, c’est le plus important. Ce besoin, c’est le temps. Les Français passent en moyenne une heure par jour dans les transports. C’est une moyenne. Ça veut dire que certains y passent quelques minutes. Et que d’autres y passent une bonne partie de leur matinée et de leur soirée. Or ce temps est précieux. C’est le temps du repos, le temps du loisir, le temps de la famille, celui des amis. C’est le temps de la « vraie distance » dont parle Fernand Braudel. Dans les grandes métropoles, les transports publics jouent globalement bien leur rôle, en tous cas dans les centres villes. En revanche, on frôle souvent la congestion chronique aux heures de pointe, notamment en périphérie. Avec ce que cela peut impliquer d’énervement, de fatigue et de stress. Mais aussi de temps et d’argent perdus pour la collectivité.

Le deuxième besoin est un besoin d’équité. Je rappelle, mais ça aussi vous le savez, que 40% de la population réside dans un territoire sans transport collectif. Et que dans ces zones, c’est la voiture ou rien. Or, le budget transport d’une personne qui vit en milieu rural est 20% plus élevé que celui d’une personne qui habite une ville de plus de 100 000 habitants. Je vous laisse deviner pourquoi. Au-delà, on voit bien ce que cela peut susciter comme sentiment d’injustice ou d’abandon. On voit aussi les problèmes que cela pose pour trouver un emploi ou accéder à des services publics aussi essentiels que l’éducation ou les soins médicaux. C’est « cet espace qui emprisonne » que je veux avec vous, libérer.

Le troisième besoin est un besoin que je qualifierais « d’agilité ». Ce qui importe aujourd’hui, c’est moins le mode de transport, que la possibilité de voyager « porte-à-porte » le plus simplement possible. Pour y parvenir, il faut pouvoir combiner plusieurs solutions, en général à partir de notre téléphone. Dans ce domaine, des innovations émergent tous les jours. Des innovations que nous ne soupçonnions pas il y a encore 3 ans, 1 an, 6 mois. Des innovations qui, mises bout à bout, commencent à ressembler à une révolution. Des innovations qu’il nous faut, nous « Etat », nous « élus », nous « autorités régulatrices », nous « entreprises » ou startup, encourager, valoriser, accompagner. Pour un jour pouvoir proposer partout, en tout point du territoire, une solution, voire plusieurs solutions de mobilité. Et j’ajouterais : « à tous les prix ».

En plus de ces besoins très concrets, du quotidien, la France, cette fois entendue en tant que « Nation » doit relever plusieurs défis. Trois pour être précis et sans doute une fois encore, non exhaustif.

Le défi de la sobriété. Sobriété en carbone, en émissions polluantes. Vous le savez, les transports représentent 1/3 des émissions de gaz à effet de serre au niveau national, 1/5 des émissions de particules fines. Parfois c’est bien plus, comme à Paris ou dans certaines agglomérations. La journée nationale de la qualité de l’air, qui aura lieu demain, sera d’ailleurs l’occasion de prendre conscience du chemin qu’il nous reste à parcourir. C’est un enjeu majeur de santé publique. Dans le droit fil des accords de Paris, la France s’est fixé comme objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. C’est le « défi des défis » ou plus exactement le défi de « plusieurs défis » : défi industriel bien sûr, défi technique, défi financier, numérique, organisationnel, défi social évidemment. Parce que la meilleure façon de réussir cette transition, c’est de l’accompagner, c’est d’aider les Français à modifier leurs habitudes et leurs comportements.

Le deuxième défi est celui de l’attractivité. Je ne vais pas m’étendre sur celui-ci car nous aurons l’occasion de le traiter dans d’autres cadres. La qualité exceptionnelle de certaines de nos réussites ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. Le président de la République l’a dit le 1er juillet 2017, des réseaux, essentiels pour la vie économique de notre pays, ne sont plus à la hauteur des besoins et des ambitions. Je pense au réseau fluvial. En tant qu’ancien maire du Havre, je pourrais aussi vous parler durant des heures des infrastructures portuaires. Ce n’est pas le sujet du jour, mais nous aurons très vite l’occasion d’échanger sur cette question qui me tient à cœur et me passionne.

Le troisième défi n’est pas, comme certains peut-être s’y attendent, le défi financier. C’est à la fois cela et plus que cela. Ce troisième défi, c’est le « défi de la sincérité ». J’ai fait référence tout à l’heure aux trois nouvelles LGV, qui représentent un investissement total d’environ 13 milliards d’euros. Je m’en réjouis évidemment. Je m’en réjouis pour les régions et les populations concernées, je m’en réjouis pour les élus et bien sûr pour les ingénieurs, ouvriers, artisans qui y ont travaillé. Le problème ne concerne pas tant le passé que l’avenir. Quel est-il ce problème ? A vrai dire, c’est plus qu’un problème, c’est une impasse. Certains Gouvernements ont beaucoup promis. Quand je dis beaucoup, je dis trop. Résultat : sur la durée du quinquennat qui commence, il manque environ 10 milliards d’euros.7 milliards pour financer les nouveaux projets pour lequel l’Etat s’est engagé ; 3 milliards pour assurer la maintenance des réseaux. On aurait pu faire comme les autres : continuer à promettre en laissant le soin à nos successeurs de dire « stop ». Avec le Président de la République, nous avons fait le choix inverse, celui de la sincérité : sincérité des promesses, sincérité des financements, sincérité des intentions, sincérité des objectifs.

L’époque des grands projets techniques, industriels n’est donc pas derrière nous, mais devant nous. Ces projets ne seront peut-être plus tout à fait proportionnels au nombre de kilomètres d’asphalte ou de rail, mais, croyez-moi, ils réclameront autant d’ingéniosité, de savoir-faire et pas mal d’investissements. C’est le propre de toute révolution « industrielle ». Parce que le transport c’est à la fois un service et une industrie. La révolution que je vous propose d’engager est celle d’un transport disponible, accessible, multiforme, multi-prix aussi, souple, rapide, économe.

Une « révolution quotidienne du quotidien » qui va permettre, à sa façon, avec ses outils, ses infrastructures, d’améliorer la vie, le confort de millions de Français. Et, ce faisant, de structurer « l’espace France » : ses villes bien sûr, mais aussi ses périphéries et ses zones rurales. Voilà, en quelques mots, l’objectif à atteindre. On peut bien sûr le critiquer, sans doute le préciser, le décliner– vous êtes là pour ça- mais cet objectif tout simple me semble répondre à des besoins, à des impératifs que j’ai pu observer en tant que maire du Havre, parlementaire ou premier ministre aujourd’hui.

Pour y parvenir, il faut d’abord réfléchir. Réfléchir pour faire des choix. Définir des priorités. Nous aurions pu le faire à l’abri des regards dans les cénacles habituels. Par souci de réalisme, de sincérité aussi, nous avons voulu en débattre au grand jour. Parce que l’époque d’une approche « verticale », centralisatrice de la politique des transports est, reconnaissons-le, un peu derrière nous. Parce qu’aujourd’hui, pour faire des « bons » transports, des transports qui rendent service aux gens, eh bien, il faut associer les « bonnes » personnes, qui sont un peu plus nombreuses qu’auparavant, un peu plus diversifiées aussi. Il faut aussi y associer les « bons métiers ».

Le Président de la République l’a annoncé : le Gouvernement présentera au Parlement au premier semestre 2018, une loi d’orientation des mobilités. Je pense sincèrement que ce sera un moment très important pour l’avenir de notre pays. Et nous avons besoin de vous pour le réussir. C’est pourquoi, pour « nourrir » cette future loi, nous lançons à partir d’aujourd’hui plusieurs initiatives et concertations. La ministre des Transports vous en dira un peu plus tout à l’heure. Ces initiatives permettront de faire le tour des sujets : déclinaison de la stratégie nationale de logistique, présentation de la politique maritime du Gouvernement au mois de novembre, lancement d’assises du transport aérien au début de l’année 2018.

Mais le cœur de cette nouvelle physionomie des transports, et je dis « le cœur » parce que c’est celle qui va toucher directement et tous les jours les Français, c’est la mobilité du quotidien. Et cette mobilité, c’est vous qui allez la dessiner à partir d’aujourd’hui et jusqu’à la mi-décembre dans ces Assises. Vous allez la dessiner autour de six axes de travail qui reprennent les besoins et les défis que j’ai évoqués :

Comment rendre nos mobilités plus propres, comment en réduire les émissions je dirais « par unité », mais aussi comment optimiser l’utilisation des véhicules existants grâce au partage ou à la rationalisation des trajets ?

Comment développer les mobilités connectées ? Les initiatives se multiplient, parfois de manière un peu anarchique. L’enjeu est bien sûr d’encourager ces initiatives, d’en développer les usages, mais aussi de les réguler et si, vous me passez l’expression, de mieux les « connecter » aux politiques de transport public.

Comment réduire les « inégalités devant la mobilité » entre, je l’ai dit, des territoires ou des zones qui cumulent tous les avantages et d’autres qui cumulent tous les inconvénients ou les obstacles ?
Quatrième axe ou quatrième question : comment assurer la complémentarité de nos différents modes de transport pour que chaque besoin ou problème de mobilité trouve sa solution ? Une complémentarité qui est aussi, en elle-même, une partie de la réponse aux questions que j’ai posées plus haut.

Comment renforcer la sécurité et la sûreté de nos transports ? Vous allez me répondre : en entretenant le réseau. Bien sûr. Mais pas seulement, car les nouvelles technologies apporteront elles-aussi des solutions.

Enfin, vous serez appelés à réfléchir aux questions de gouvernance et de financement. Durant les 3 prochains mois, chacune de ces questions sera instruite par les meilleurs experts dont nous disposons, sous l’égide d’une personnalité reconnue pour sa connaissance des sujets. J’ai eu le plaisir de les rencontrer juste avant de m’exprimer devant vous. Je leur ai donné les objectifs dont je viens de vous parler. Je leur ai fait part aussi de ma confiance, de celle du Gouvernement, pour mener à bien cette mission.

Ces questions, nous les poserons aussi directement aux Français, qui sont les premiers concernés, grâce à des consultations que nous organiserons partout en France.

Avant de conclure, je voudrais insister sur deux points très importants.

Le premier concerne le financement des infrastructures. Nous allons en effet essayer de faire mieux que définir des priorités. Nous allons en programmer le financement de manière précise, soutenable et dans la durée. Dès aujourd’hui, nous mettons en place un conseil d’orientation des infrastructures. Son but ? Proposer une planification capable de nous donner, collectivement, de la visibilité sur une dizaine d’années. Ce conseil proposera ainsi une programmation du financement de nos infrastructures, à la fois des nouveaux projets qui seront lancés et de l’entretien du réseau. Elle sera particulièrement détaillée pour les 5 premières années. Elle devra surtout être sincère, soutenable, c’est-à-dire équilibrée en recettes et en dépenses. Cette programmation sera adossée au projet de loi d’orientation et donc, de ce fait, soumise au Parlement. J’ai souhaité confier la présidence de ce conseil à Philippe Duron. Le choix n’a pas été trop difficile à faire. D’abord parce que Philippe Duron est un Normand. Ensuite parce qu’il est un fin connaisseur des transports. En plus d’avoir été un grand élu local, il a présidé aux destinées de l’AFITF jusqu’en 2017. Tout le monde a salué la qualité de son travail à la tête de la commission Mobilité 21 qui avait été chargée en 2013 de faire le tri dans les projets d’infrastructures retenus dans le cadre du schéma national d’infrastructures de transport. Il était donc le « Normand de la situation ». Et je le remercie très sincèrement d’avoir accepté cette mission.

Monsieur le président Duron, vous comprenez mieux que quiconque l’attente des élus pour leurs projets et vous savez les réactions que provoque la pause dans les grands projets d’infrastructure. Je vous connais assez pour savoir que vous mènerez vos travaux avec discernement, dans un esprit d’égalité de traitement, en vous fondant sur l’utilité socio-économique des projets et en imaginant des solutions de financement et de gouvernance innovantes. Sans cela, vous le savez, nous le savons tous, l’impasse que je mentionnais tout à l’heure ne pourra pas être résolue.

Permettez-moi de m’attarder sur deux projets particuliers par leur ampleur, par l’attachement que leur portent élus et responsables économiques et par la vigueur des propos qu’ils ont suscités ces dernières semaines.

Premièrement, le tunnel ferroviaire entre Lyon et Turin. La France est engagée par un accord binational avec l’Italie. La France tient ses engagements et le Président de la République aura l’occasion d’évoquer ce sujet le 27 septembre prochain à l’occasion du sommet qui se tiendra à Lyon.

Deuxièmement, le Canal Seine-Nord Europe. J’ai entendu l’émotion, légitime, que l’annonce de la pause a provoquée dans les Hauts-de-France. J’ai observé aussi la solidarité d’une région autour de ce projet et la volonté des élus locaux de trouver les solutions pour le rendre possible.

Quelle est aujourd’hui la situation ? Elle est à la fois simple et complexe.

Simple parce que pour ce projet de 4,9 Md€, l’Etat s’est engagé à hauteur de 1 Md€, les collectivités locales à hauteur de 1 Md€ et l’Europe à hauteur de 2 Md€. Restent 900 M€ qu’il faudra emprunter. 900 M€ qu’il faudra garantir aussi et rembourser.

Et c’est là que la situation devient complexe car, d’une part, l’Etat a promis 1 Md€ mais j’ai indiqué plus tôt ce qu’il en était des engagements enthousiastes des gouvernements précédents.

Et d’autre part, l’emprunt serait aujourd’hui contracté par l’Etat, garanti en tout cas par l’Etat et compte tenu de l’absence de recettes affectées, remboursé par l’Etat.

De 1 Md€ de l’Etat, on passe à 1,9 Md€. Les collectivités locales ont fait un effort en proposant de verser en premier leur contribution, repoussant d’autant les paiements de l’Etat. C’est un geste significatif.

Mais il faut encore trouver la solution pour l’emprunt. C’est pourquoi j’ai chargé Gérald DARMANIN et Elisabeth BORNE de réfléchir et d’analyser une solution reposant sur la transformation de la société de projet d’Etablissement public de l’Etat en Etablissement public local, les collectivités locales assumant la conduite du projet, ce qui est inédit pour une réalisation de cette ampleur.
Il s’agira également de garantir les recettes permettant de rembourser l’emprunt et, plus généralement, le financement de l’opération, en mettant en place une ressource compatible avec la logique de report modal qui est au cœur de ce projet.

Le second point que je voulais aborder concerne le modèle économique ferroviaire.
Je souhaite qu’en parallèle de ces Assises, nous menions une réflexion particulière à ce sujet.Nous le savons : il y a de multiples questions sur l’avenir du transport ferroviaire. Après avoir doté la France du réseau TGV le plus performant d’Europe, il est temps de réorienter ce secteur vers les mobilités du quotidien et de tirer les conséquences de la montée en puissance des métropoles.

Cela suppose de se poser la question de la place du ferroviaire dans l’ensemble des mobilités. Cela suppose de se poser aussi la question de son modèle économique. Je rappelle que l’endettement du seul réseau croit de 3 mds d’euros par an. Je rappelle aussi que 70% des dessertes de son fleuron, le TGV, sont déficitaires.

Dans un monde qui s’ouvrira de manière progressive et maitrisée à la concurrence, nous devons réfléchir aux moyens d’assurer la stabilité et la compétitivité de ce secteur clef.

C’est pourquoi j’ai souhaité que ces questions soient abordées de façon cohérente et à part. L’objectif, quel est-il ? Il est de doter l’Etat d’une stratégie claire pour renforcer ses transports ferroviaires. Durant les prochains mois, Jean-Cyril Spinetta sera chargé de proposer les conditions d’une transformation réussie du secteur ferroviaire. Il me rendra ses conclusions après les Assises, durant le 1er trimestre 2018.

Le débat pourra ainsi s’engager sur des bases saines et solides. Instruit, documenté, chiffré grâce à vous, ce débat se déroulera devant les représentants de la Nation, c’est-à-dire devant tous les Français. Il sera riche, il sera passionnant. Il sera surtout sincère, utile, salutaire même, car il permettra d’engager résolument notre pays dans la voie de la mobilité du 21è siècle.

RÉFÉRENCE
PHILIPPE Édouard,
« Ouverture des Assises de la mobilité », Discours, mardi 19 septembre 2017, Palais Brongniard, Paris.
http://www.gouvernement.fr/partage/9506-ouverture-des-assises-de-la-mobilite


RÉFÉRENCES

1. CHAMPAGNE Éric et NEGRON-POBLETE Paula, « La mobilité urbaine durable : du concept à la réalité », VertigO, La revue électronique en sciences de l’environnement, 11 mai 2012. http://vertigo.revues.org/11779 ; DOI : 10.4000/vertigo.11779

© Marie LAPEIGNE, 8 novembre 2017, 16 heures.

ISSN 2495-1161. Dépôt légal du numérique, BNF 2017
http://portes-essonne-environnement.fr

Les 17 objectifs mondiaux du développement durable 2015. Où en est-on deux ans après ?

Les 17 objectifs mondiaux du développement durable (en anglais Sustainable Development Goals) adoptés le 2 août 2015, ont été approuvés le 25 septembre 2015 par 193 pays pour la période 2015-2030. Portés par l’Organisation des Nations unies (ONU), ils ont pour but le développement international.

Le dispositif actuel comprend :

  • 17 objectifs,
  • 169 cibles,
  • 244 indicateurs.

Où en sommes-nous deux ans après ?

« La Planète des singes Suprématie » dans le métro de Paris. (1) Ligne n° 5 Place d’Italie-Bobigny-Pablo Picasso, station Gare d’Austerlitz. © Photographie BM/CAD pour PEE, 28 juillet 2017.


Les 17 objectifs mondiaux du développement durable

  • 1. PAUVRETÉ. Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde.
  • 2. FAIM. Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable.
  • 3. SANTÉ. Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge.
  • 4. ÉDUCATION. Assurer à tous une éducation équitable, inclusive et de qualité et des possibilités d’apprentissage tout au long de la vie.
  • 5. GENRES. Égalité des genres : parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles.
  • 6. EAU. Garantir l’accès de tous à des services d’alimentation en eau et d’assainissement gérés de façon durable.
  • 7. ÉNERGIE. Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable.
  • 8. EMPLOI. Promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous.
  • 9. INNOVATION. Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation.
  • 10. INÉGALITÉS. Réduire les inégalités dans les pays et d’un pays à l’autre.
  • 11. VILLES. Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients et durables.
  • 12. CONSOMMATION. Établir des modes de consommation et de production durables.
  • 13. CLIMAT. Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions.
  • 14. OCÉANS. Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable.
  • 15. ÉCOSYSTÈMES ET BIODIVERSITÉ. Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres, en veillant à les exploiter de façon durable, gérer durablement les forêts, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des terres et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité.
  • 16. PAIX. Promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et inclusives aux fins du développement durable, assurer l’accès de tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous.
  • 17. PARTENARIAT MONDIAL. Renforcer les moyens de mettre en œuvre le Partenariat mondial pour le développement durable et le revitaliser. 

Les 169 cibles

L’Assemblée générale de l’ONU en adoptant l’Agenda 2030 instaurant les 17 objectifs de développement durable (ODD) a élaboré une liste de 169 cibles pour la période 2015-2030. Trois buts essentiels sont poursuivis :

  • lutter contre les inégalités, l’exclusion et les injustices ;
  • faire face au défi climatique ;
  • mettre fin à l’extrême pauvreté.

Les 244 indicateurs

En mars 2017, la commission statistique des Nations Unies a validé une liste de 244 indicateurs relatifs aux 17 objectifs et aux 169 cibles de développement durable à l’horizon 2030. Cette liste, destinée au suivi mondial des ODD, doit être révisée en 2020 et 2025 pour tenir compte des développements méthodologiques et des capacités de chacun des pays à produire ces données. Chaque année, le Secrétaire général de l’ONU établira un rapport annuel de suivi et d’examen des ODD au niveau mondial. Les États sont également invités à réaliser des rapports nationaux qui doivent s’appuyer sur leurs propres indicateurs nationaux de suivi.


Quelles avancées significatives ces deux dernières années pour inverser les évolutions funestes du monde ?

L’opinion publique a le sentiment, qu’à quelques exceptions près, l’ensemble des élus et des administrations se désintéressent au quotidien de l’exécution par la France de ses engagements internationaux. Des engagements qui ne sont pas seulement pour la France mais aussi pour le monde. On serait tenté de citer Blaise PASCAL lorsqu’il écrivait ce qu’il décrivait comme l’ « empêchement de la pensée ».

« Les hommes n’ayant pu guérir la mort, la misère, l’ignorance, ils se sont avisés, pour se rendre heureux, de n’y point penser. Nonobstant ces misères, il veut être heureux, et ne veut être qu’heureux, et ne peut ne vouloir pas l’être. Mais comment s’y prendra t il ? Il faudrait, pour bien faire, qu’il se rendît immortel. Mais ne le pouvant, il s’est avisé de s’empêcher d’y penser. » (2)


La difficile évaluation de l’exécution des engagements

En France, le ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES) et le Ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) coordonnent et accompagnent la mise en place des ODD.

Au niveau national, le Commissariat général au développement durable (CGDD) publie un rapport annuel sur les ODD. L’INSEE effectue un recensement auprès des producteurs de statistiques publiques afin d’avoir un premier aperçu sur la faisabilité et la disponibilité des indicateurs statistiques en France. (3)

RÉFÉRENCES
1. « La Planète des singes. Suprématie » (War for the Planet of the Apes), film de science-fiction américain coécrit et réalisé par Matt REEVES (2017), nouvelle variation à partir du roman La Planète des singes (1963) de Pierre BOULLE (1912-1994).
2. PASCAL Blaise, Pensées. On se reportera au site conjoint de l’Université de Clermont-Ferrand/CNRS/BNF « Les Pensées de Blaise Pascal » qui propose références et commentaires :
http://www.penseesdepascal.fr/Divertissement/Divertissement2-moderne.php. Fragment Divertissement 2 / 7. Papier original : RO 121-2 ; copies manuscrites du XVIIe: C1 : Divertissement n° 184 p. 53 / C2 : p. 75 ; Éditions de Port-Royal. Chap. XXVI – Misère de l’homme: 1669 et janv. 1670 p. 217 / 1678 n° 4 p. 211 ; Éditions savantes : Faugère II, 39, IV / Havet IV.5 / Brunschvicg 169 et 168 / Tourneur p. 205-1 / Le Guern 124 / Lafuma 134 et 133 / Sellier 166.
3. http://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/.

© Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, 10 août 2017, 10 heures.

ISSN 2495-1161. Dépôt légal du numérique, BNF 2017
http://portes-essonne-environnement.fr

Aéroport d’Orly. Chronique des travaux 2016 (4) : le vrai bilan des nuisances aériennes (18 juillet – 28 août 2016)

Un avion toutes les deux minutes

De nouvelles communes situées au sud de l’aéroport d’Orly ont été survolées durant six semaines, du 18 juillet au 28 août 2016. La raison avancée par l’établissement public Paris-Aéroport (Groupe ADP) et par son administration de tutelle, la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) du ministère des Transports est  le suivant : la nécessité de réaliser des travaux de rénovation et la mise en sécurité des pistes.

Après un mois quel est le vrai bilan de ces nuisances subies par les habitants situés dans l’axe Brétigny-sur-Orge, Saint-Michel-sur-Orge, Sainte-Geneviève-des-Bois, Villemoisson-sur-Orge, Épinay-sur-Orge, Morsang-sur-Orge, Savigny-sur-Orge, Viry-Châtillon, Juvisy-sur-Orge, Paray-Vieille-Poste, Athis-Mons ?

Un bilan prématuré et partial

« Très vive début juillet, la colère des habitants s’est finalement atténuée », pouvait-on lire dans Le Parisien Essonne-Matin (édition du 22 août 2016). Il est étonnant que cette conclusion ait été tirée avant que la période de survol ne soit achevée totalement. (1)

Cet article poursuivait en minimisant les effets des nuisances.

« Finalement, le ciel ne leur est pas tombé sur la tête. Très redoutées au début de l’été, les nuisances aériennes ont finalement eu moins d’impact que prévu sur le quotidien des habitants du nord-est de l’Essonne (voir ci-contre). Le 18 juillet, un chantier de six semaines a démarré sur l’aéroport d’Orly (Val-de-Marne). Ces travaux de rénovation de la piste 4, qui doivent s’achever en fin de semaine, ont décalé le trafic sur la piste 2 dite « de secours », située plus proche des habitations. Un contexte qui a entraîné les gênes attendues quelques jours après le début des travaux avant une accalmie constatée en milieu de chantier. »

LIBELLULE A SSO - SMM

Une libellule dans un jardin de Savigny-sur-Orge. Les habitants de la Vallée de l’Orge auraient préféré vivre au rythme calme de cet insecte odonate durant l’été 2016, plutôt que sous le bruit des avions. © SMM pour PEE, 26 août 2016.

Des arguments trompeurs

A l’appui de sa conclusion, le journal Le Parisien Essonne-Matin relate deux témoignages. Ceux des maires de Viry-Châtillon et de Savigny-sur-Orge.

  • Viry-Châtillon. « Nous avons reçu une demi-douzaine d’appels par jour en mairie lors des deux premières semaines, constate ainsi Jean-Marie Vilain (UDI), le maire de Viry-Châtillon. Les gens se plaignaient du bruit et cherchaient des explications. Depuis quelques jours, nous avons l’impression que la commune est moins survolée. La situation s’est calmée. »
  • Savigny-sur-Orge. « Le constat est similaire dans la ville voisine de Savigny-sur-Orge. « Les premiers jours, nous avons reçu une vingtaine de courriers à l’hôtel de ville. Les gens se plaignaient de la fréquence des passages mais aussi de la faible hauteur du survol, constate-t-on au cabinet du maire Eric Mehlhorn (LR). Il y a eu aussi des réactions sur les réseaux sociaux. » Depuis, la situation est « rentrée dans l’ordre » affirme encore l’entourage d’Eric Mehlhorn. »

On remarquera l’acceptabilité tacite de la situation ainsi, encore une fois, la volonté de minimiser les effets des nuisances.

Des indicateurs non pertinents

D’une part, le nombre de plaintes (appels téléphoniques, lettres, mails, SMS…) enregistrées par deux mairies constituent des indicateurs invérifiables. D’autre part, il faudrait s’interroger sur la représentativité des démarches effectuées auprès des mairies. Celles-ci sont-elles considérées par les habitants comme des instances de lutte contre les nuisances qu’ils subissent ?  Ce n’est pas sûr.

On doit également s’interroger lorsque l’on sait qu’une démarche entreprise par quatre maires est demeurée sans effet. « Aux côtés de ses collègues de Viry-Châtillon, Juvisy-sur-Orge et Athis-Mons, le maire de Savigny-sur-Orge a adressé fin juillet un courrier à Ségolène Royal, ministre de l’Environnement dénonçant notamment la multiplication des rotations et un non-respect du couvre-feu instauré à 23 h 30. « Cette lettre est restée sans réponse », déplore Jean-Marie Vilain. » Alors, les mairies sont-elles des instances efficaces face à Paris-Aéroport (ADP) ? (2)


Les étranges arguments des maires

Prenons l’exemple d’Olivier LÉONHARDT, maire de Saint-Geneviève-des-Bois (35 868 habitants) et président de l’agglomération Cœur d’Essonne (21 communes, 193 221 habitants). Il écrit dans Votre Ville, le bulletin municipal de Sainte-Geneviève-des-Bois, un article dans lequel il se borne à reproduire les informations développées par Paris-Aéroport (ADP) avec, pour appel, la phrase «quelques explications d’ADP pour mieux comprendre». Ce faisant, il accepte les arguments de l’autorité productrice de nuisances. Il avait annoncé que l’agglomération porterait plainte pour non respect des engagements pris au sujet du survol des communes dans l’axe de la piste 2 de façon discontinue et avec faibles nuisances. Il a renoncé, contrairement à Marjolaine RAUZE, maire de Morsang-sur-Orge, qui a lancé une pétition contre les nuisances aériennes répétées et le non-respect des engagements pris par ADP pour les travaux de l’été 2016. (3) (4)

« SURVOL DE SAINTE-GENEVIÈVE-DES-BOIS : DES TRAVAUX A ORLY DU 18/07 AU 28/08/2016

Comme nous avions tenu à vous en informer dans le Votre Ville de Juillet/Août, Sainte-Geneviève-des-Bois (entre autres) est, depuis ce matin, survolée, en raison de travaux réalisés par Aéroport de Paris sur la piste 4 à Orly.
Si les nuisances sonores sont évidentes pour les foyers génovéfains, ces travaux de rénovation et de mise en conformité sont nécessaires pour la sécurité des avions et leurs passagers. Quelques explications d’ADP pour mieux comprendre.

La rénovation est liée aux conditions d’usure normale de l’infrastructure. L’enrobé de la piste 4 date de 2006, la durée de vie est d’environ 10 ans. Des zones sont abîmées avec des attaques liées à la météorologie et à l’usage de la piste. De ce fait, la maintenance est importante pour sécuriser cette piste. Pour rappel, les rénovations de pistes sont nécessaires afin de maintenir la capacité opérationnelle de l’aéroport et la sécurité du personnel comme des voyageurs. Les avions roulant dessus à près de 250 km/h.

L’aire de sécurité d’extrémité de piste sera prolongée de 200 mètres afin de réduire les risques. Les déplacements aviaires et les cheminements de surveillances de piste seront refaits à neuf. Paris Aéroport profite de l’opportunité de cette rénovation pour améliorer la mise en sécurité de la piste en installant un nouveau système d’atterrissage aux instruments. Il doit permettre une utilisation plus performante de la piste dans des conditions météorologiques particulières. Il augmentera la sécurité des appareils sur la plate-forme, quel que soit le sens d’atterrissage.

La piste a été réalisée en 1963, rénovée en partie en 1995, puis en 2006 et 2009. Certaines zones sont vétustes. Les équipements électriques, les câblages, toutes les alimentations électriques et tous les systèmes qui permettent d’alimenter électriquement les pistes seront refaits en 2016-2017. Le but est de répondre aux nouvelles normes européennes. Les travaux seront réalisés dans le cadre d’une démarche environnementale avec la technologie «leds » pour le balisage entièrement rénové.

La piste 4 sera complètement fermée à l’exploitation durant les six semaines de l’été 2016. Seules la piste 3 (08/26) et piste 2 dite de secours (02/20) seront en activité. Paris Aéroport a élaboré le phasage de telle manière à optimiser le plus possible la durée des travaux. Il a été demandé aux compagnies aériennes de réduire l’activité durant ce temps. Un travail avec les compagnies a donc été effectué de façon à limiter à la baisse la programmation des vols sur la base du volontariat avec des déplacements ou des suppressions provisoires de vols. Le respect du couvre-feu et l’impact limité des travaux sur les opérateurs aériens ont été les deux cadres de ce phasage.

Sur les six semaines de l’été 2016, les équipes travailleront 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, afin de comprimer le plus possible la gêne.

Pour rappel, les travaux ont été programmés sur la période la moins pénalisante pour les foyers. Cœur d’Essonne Agglomération et la Municipalité ont obtenu de l’aéroport d’Orly qu’aucun avion ne survole la zone avant 7h du matin. » Pour toute question : DGAC – Direction des Services de la Navigation Aérienne. Tel : 01 58 09 43 21 » (5)


A la recherche de l’argument qui tue

Si les nuisances sonores sont reconnues, elle sont justifiées par la sécurité, par l’environnement (qui peut être contre des leds ?), ainsi que par l’indépassable « moins pénalisant ». A aucun moment on n’envisage de diminuer drastiquement les vols pour laisser à la piste 2 sa vocation de secours ou de fermer l’aéroport durant un bref laps de temps comme cela se pratique ailleurs. Alors, nous assistons à l’affrontement argumentaire : il y a ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Avec le renfort de ceux qui soutiennent ceux qui sont pour, et celui de ceux qui sont contre mais qui pensent au fond d’eux-mêmes qu’on ne peut rien faire, que c’est un moment à passer et que, donc, il faut le subir.

La fascination du transport aérien et sa croissance démesurée, les déplacements inutiles qu’il suscite – au mépris de toute sobriété – la coûteuse guerre économique entre les compagnies concurrentes, le mythe de la compétition économique mondialisée, les emplois faussement créés dans les zones aéroportuaires… sont autant de justifications pour repousser sans cesse les limites des survols des riverains par les avions.


Les nuisances oubliées

Les maires et les associations, s’ils évoquent les nuisances sonores, évoquent rarement les nuisances causées par la pollution des gaz de combustion des réacteurs volant à basse altitude. Une altitude qui, contrairement à ce qui a été annoncé dans la presse locale (dernier article du Parisien Essonne-matin), semble plus basse qu’au démarrage des travaux lorsque l’on étudie le sujet pour une localisation terrestre fixe sur toute la durée de la rénovation  de la piste 4. Par ailleurs, des lecteurs du présent site ont rapporté d’importantes déflagrations notamment sur le plateau de Juvisy-sur-Orge causant de nombreux dégâts à des toitures de maisons. Quels recours ont ces riverains ?

IC JSO PLATEAU 24-08-2016 1

Quartier de Juvisy Plateau : passage des avions à basse altitude, des déflagrations suivies de bruits de tuiles, lors des travaux 2016 de la piste 4 d’Orly. © Isabelle CANDELIER, 24 août 2016. (6)

IC JSO PLATEAU 24-08-2016 2

Quartier de Juvisy Plateau : zoom sur la toiture d’une maison ayant subi des dégâts après le passage d’un avion à basse altitude avec déflagration suivie de bruits de tuiles se décrochant de la toiture (voir au centre de la photographie). © Isabelle CANDELIER, 24 août 2016. (6)

Conclusions pour les sinistrés des travaux d’Orly 2016. Davantage de bruit. Davantage de gaz de combustions. Davantage de poussières… Des élus fatalistes et complaisants. Que demander de plus ? Et dire que cela doit recommencer l’année prochaine en 2016, puis en 2018 et en 2019…


RÉFÉRENCES
1. DEGRADI Laurent, « Le bruit des avions s’estompe avec la fin des travaux d’Orly. Transports. En raison de travaux sur les pistes, le Val d’Orge a été survolé tout l’été par les avions. Très vive début juillet, la colère des habitants s’est finalement atténuée », Le Parisien Essonne-Matin, 22 août 2016 (pdf) :
LPE ORLY 22-08-2016.
2. Lettre des maires de Juvisy-sur-Orge, de Savigny-sur-Orge et de Viry-Châtillon à Madame la Ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, 25 juillet 2016 (pdf) :
JSO SSO VC A SG 25 juillet 2016.
3. F. L. et C. Ch, « Vallée de l’Orge. Les maires s’unissent contre ADP », www.leparisien.fr, 26 juillet 2016 (pdf) : Vallée de l’Orge : les maires s’unissent contre ADP – Le Parisien. « Aéroport d’Orly. Nuisances aériennes : les maires renoncent à porter plainte », Le Parisien Essonne-matin, 8 août 2016 (pdf) : LPE ORLY CER 08-08-2016.
4. Commune de Morsang-sur-Orge. « Pétition : Morsang mobilisée contre les nuisances sonores », http://www.morsang.fr/spip.php?article15292. Page consultée le 27 août 2016. 331 signataires de la pétition mise en ligne : https://www.change.org/o/ville_de_morsang_sur_orge.

Travaux Aéroport d’Orly : Stop aux nuisances sonores à Morsang
Ville de Morsang sur Orge
La Municipalité et la population Morsaintoise exigent de la DGAC et de la Direction d’ADP que soient respectés les engagements pris :  respect des horaires du couvre feu, de l’altitude lors des phases d’atterrissage et de décollage, réduction de la fréquence et du nombre de vols, afin de limiter, le plus possible les nuisances sonores subies en raison des travaux de rénovation de la piste 4 de l’Aéroport d’Orly.

Rappelons que cette commune fait partie de la communauté d’agglomération Coeur d’Essonne.
5. Commune de Sainte-Geneviève-des-Bois, « Survol de Sainte-Geneviève-des-Bois : des travaux a Orly du 18/07 au 28/08/2016 », www.sgdb91.com/news/actualites/actualites/survol-de-sainte-genevieve-des-bois-des-travaux-a-orly-du-1807-au-28082016-1.html. Page consultée le 8 août 2016.
6. Photographies reproduites avec l’aimable autorisation d’Isabelle CANDELIER, habitante de Juvisy-sur-Orge, 24 août 2016.

© Paul-André BEAUJEAN, 27 août 2016, 23 h.

ISSN 2495-1161. Dépôt légal du numérique, BNF 2016.

Aéroport d’Orly. Chronique des travaux 2016 (3) : la DGAC confirme l’augmentation incessante du niveau des nuisances subies par les riverains

Dans notre précédent article sur les travaux de la piste 4 de Paris-Orly, nous regrettions l’étonnant silence de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC). Par la voie de sa Mission Environnement, elle vient de nous communiquer les réponses aux questions posées. (1)

La réponse de la DGAC

Lisons ensemble le courriel de la Mission Environnement de la Direction des services de la navigation aérienne (DSNA) de la DGAC :

Sujet : Travaux Orly – Survols de Savigny-sur-Orge (91) Date : Fri, 05 Aug 2016 14:12:41 +0200 De : Environnement-DSNA <environnement-dsna@aviation-civile.gouv.fr> Pour : Jean-Marie CORBIN

Bonjour,

Vous avez demandé des précisions sur le nombre de décollages et atterrissages sur les pistes 2 et 3 à l’aéroport de Paris-Orly dimanche 24 juillet.

Il ressort de l’étude menée que 673 mouvements ont eu lieu ce jour-là :
222 avions au décollage de la piste 2 (aucun à l’atterrissage) ;
114 avions au décollage de la piste 3 et 337 à l’atterrissage de cette piste

Nous vous précisons que ces travaux engendrent des modifications d’exploitation de l’aéroport mais ils contribueront à la sécurité aéronautique et à l’efficacité opérationnelle de la plate-forme.

Cependant, les premières journées de travaux n’ont pas permis de gérer les 3 périodes de pointe comme il avait été annoncé car le trafic a été très dense. Mais nous vous confirmons que la situation devrait progressivement s’améliorer.

Si vous souhaitez obtenir rapidement des informations de nature factuelle sur des survols, n’hésitez pas à prendre contact avec la maison de l’environnement de Paris-Orly, gérée par Aéroports de Paris et ouverte du lundi au vendredi de 08h30 à 16h30 (tél 01 49 75 90 70).

Elle dispose du système VITRAIL permettant d’apporter un premier niveau d’information sur des survols, par la visualisation en temps différé des trajectoires des avions.

Cordialement,
DSNA/Mission Environnement

DECOLLAGE SSO 06-08-2016 2

Survol de Savigny-sur-Orge dans l’axe de décollage de la piste 2 de l’aéroport Paris-Orly, le 6 août 2016, à 14 h 22. © Photographie MM pour PEE.


Confirmation de notre analyse par la DGAC

673 mouvements en une journée représentent sur un an 245 645 mouvements. Nous sommes toujours au dessus de la moyenne annuelle confortant notre première analyse.

Nous sommes dans une relation « un tiers / deux tiers » au niveau des usages des pistes. Conformément à nos calculs, publiés dans notre précédent article, la piste 3 chargée de 451 mouvements a été saturée toute la journée du 24 juillet 2016. Le reste du trafic, un tiers, a donc été reporté sur la piste n° 2. Cela ne relève plus de l’usage exceptionnel comme cela a été présenté en avril dernier.

  • Les travaux « contribueront à la sécurité aéronautique et à l’efficacité opérationnelle de la plate-forme. » Au même titre que l’on ne sait pas quelle est la proportion entre ceux qui sont supprimés et ceux décalés sur les soi-disant 2 000 mouvements réaménagés pendant 6 semaines, on ne sait plus si l’intérêt majeur des travaux est d’améliorer l’efficacité de la plateforme ou bien, comme annoncé, seulement sa sécurité…
  • « Si vous souhaitez obtenir rapidement des informations de nature factuelle sur des survols, n’hésitez pas à prendre contact avec la maison de l’environnement de Paris-Orly, gérée par Aéroports de Paris« . Sauf que dans un courriel en date du 28 juillet 2016, le Pôle relations territoriales Sud de la Maison de l’environnement et du développement durable de Paris-Orly nous avait répondu que : la « Mission Environnement de la Direction Générale de l’Aviation Civile vous apportera directement des éléments de réponse à vos interrogations qui relèvent de leur compétence ». On tourne en rond, tels des avions attendant qu’une piste veuille bien se libérer pour atterir. A ce rythme-là, on va à la panne sèche de kérosène…

Fort de cette seconde série de chiffres, il apparaît qu’ADP n’a jamais souhaité faire de concession pour la tranquillité des riverains et entend bien ainsi tester leur résilience à supporter les développements aéroportuaires à venir d’Orly.

Ces faits confirment que les nuisances aériennes subies par les riverains :

  • sont considérées comme légitimes par la DGAC : c’est-à-dire, comme un mal naturel qui est une conséquence du développement des transports aériens,
  • font l’objet d’une stratégie différenciées selon les territoires survolés (tantôt l’un, tantôt l’autre),
  • sont en constante augmentation. (2)

Pour la journée du dimanche 24 juillet 2016, 673 mouvements d’avions (sur les seules pistes 2 et 3 d’Orly) représentent sur une durée de 17,5 heures (de 6 h 00 à 23 h 30), une moyenne de 39 avions à l’heure, soit un avion toute les deux  minutes.

Il reste important de se mobiliser très fortement pour exiger une réduction significative des mouvements (au moins de 30 %) pour les prochaines sessions de travaux prévus durant les étés 2017, 2018 et 2019. Ce qui nécessite le refus des arguments fatalistes qui justifient l’augmentation du trafic, et par voie de conséquence, légitiment la dégradation continue et durable de la qualité de vie des riverains et des Sud-franciliens.

DECOLLAGE SSO 06-08-2016

Survol de Savigny-sur-Orge dans l’axe de décollage de la piste 2 de l’aéroport Paris-Orly, le 6 août 2016, à 14 h 22. © Photographie MM pour PEE.


RÉFÉRENCES
1. CORBIN Jean-Marie, MÉRIGOT Bernard, « Aéroport d’Orly. Chronique des travaux 2016 (2) : nuisances aériennes, ce qu’ADP (Paris Aéroport) cache aux riverains », www.portes-essonne-environnement.fr, 2 août 2016 : http://portes-essonne-environnement.fr/aeroport-dorly-chronique-des-travaux-2016-2-nuisances-aeriennes-ce-quadp-paris-aeroport-cache-aux-riverains/.

2. Quelles sont les missions de la Direction des services de la navigation aérienne (DGAC) du ministère de l’Environnement ? Elles apparaissent ainsi sur le site officiel du ministère :

« Les missions de la DSNA (prestataire de service de navigation aérienne et service à compétence nationale) sont de fournir aux usagers de l’espace aérien les services de contrôle du trafic aérien, dans les meilleures conditions de sécurité, de régularité et de prix ; préserver l’environnement grâce à différents engagements du Grenelle Environnement ; faire évoluer les moyens du contrôle aérien.”
Site internet consulté le 8 août 2016 : http://www.developpement-durable.gouv.fr/-Navigation-aerienne-.html.

Le malentendu réside dans le fait que la DSNA s’adresse aux « usagers de l’espace aérien » et non aux « usagers des territoires survolés ». D’où le discours que l’on peut qualifier de « convenu » qu’elle tient : annonce de travaux, justification des nuisances supplémentaires, contraintes du couvre-feu pour ADP, incertitudes diverses…

PEE lui a écrit le 25 juillet 2016. Elle nous a répondu le 8 août 2016, à 11 h 54.

« Objet: Travaux Orly : survols des communes des Portes de l’Essonne

Bonjour,

Par mail du 25 juillet, vous avez demandé des informations sur les passages fréquents d’avions de ligne à basse altitude au-dessus de certaines communes de l’Essonne.

Aéroports de Paris vous a apporté plusieurs réponses et que nous complétons ci-dessous.

Les survols actuels de certaines communes de l’Essonne sont effectivement dus aux travaux de la piste n°4 en cours sur la plateforme de Paris-Orly et programmés du 18 juillet au 28 août 2016.

Ces travaux, réalisés par Aéroports de Paris, engendrent des modifications d’exploitation de l’aéroport et ils contribueront à la sécurité aéronautique et à l’efficacité opérationnelle de la plate-forme.

Pendant cette période, l’objectif des services de la Navigation aérienne d’Orly est que les décollages et atterrissages des aéronefs s’effectuent essentiellement en piste unique (piste 3), avec une utilisation de la piste 2 durant les périodes quotidiennes de pointe (matin, début d’après-midi et soirée).

Ces éléments d’information ont été annoncés lors de la réunion organisée par Aéroports de Paris le 15 avril 2016 pour les élus des communes concernées et lors de la Commission Consultative de l’Environnement (CCE) du 16 juin 2016.

La DGAC avait bien confirmé, lors de cette réunion, l’intention d’utiliser la piste 2 lors des pointes de trafic, compte tenu des limitations de la seule piste Est-Ouest (piste n°3) restant disponible. Cependant, la complexité de la gestion de la plateforme dans cette configuration, où un certain nombre de voies de circulation au sol sont indisponibles pour travaux, rend la tâche des contrôleurs d’autant plus difficile lorsqu’il s’agit d’alterner en toute sécurité des changements de configuration de piste en cours de journée. De plus, la nécessité de respecter le couvre-feu (entre 23h30 et 06h00 locales), imposée sur la plateforme, empêche de lisser le trafic en décalant significativement le programme de vol de la journée.

La DGAC a conscience de l’impact sur les populations riveraines des survols dus à un plan de circulation aérienne exceptionnel très dépendant des travaux réalisés par ADP.

Dans l’immédiat et pour le reste de la période des travaux, la DGAC s’engage à adapter au mieux les configurations de piste à la demande de trafic, tout en respectant les limites qu’impose le couvre-feu.

La baisse de trafic attendue pour le mois d’août laisse espérer une utilisation moindre de la piste Nord-Sud (piste n°2), quoique la situation opérationnelle doive rester tendue jusqu’à la fin des travaux.

Cordialement,
DSNA/Mission Environnement

Ainsi donc, il ne faut guère compter sur un ralentissement des nuisances aériennes et des pollutions au-dessus des villes survolées durant ce mois d’août 2016…

© Jean-Marie CORBIN, Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, 9 août 2016, 22 h 30.

ISSN 2495-1161. Dépôt légal du numérique, BNF 2016.


Complément : Vidéo amateur d’un avion au décollage de la piste 2 le 6 aout 2016.

Avion survolant Savigny-sur-Orge dans l’axe de décollage de la piste 2 de l’aéroport Paris-Orly, durant les travaux 2016 de la piste 4, engendrant d’importantes gênes sonores dans un secteur habituellement calme pour ce type de nuisances, ainsi qu’une pollution atmosphérique s’ajoutant au trafic routier et ferré. L’avion décollant a emprunté l’axe Orly (piste 2) / Athis-Mons / Juvisy-sur-Orge / Savigny-sur-Orge / Morsang-sur-Orge / Villemoisson-sur-Orge / Epinay-sur-Orge… © MM pour PEE, 6 août 2016.

© Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, 9 août 2016, 22 h 45.

ISSN 2495-1161. Dépôt légal du numérique, BNF 2016.

Aéroport d’Orly. Travaux sur la piste 4 durant l’été 2016 confirmés

Le 15 avril 2016, face à des élus, des associatifs et des riverains, Franck MEYREDE, directeur de l’aéroport Paris-Orly, a présenté le programme de rénovation des pistes en raison de l’usure normale et d’une mise aux normes aéronautiques européennes obligatoires. (1) Une brochure explicative a été distribuée afin de permettre à l’assistance une communication vers leurs adhérents et vers les habitants concernés par les modifications d’utilisation des pistes durant la période du 18 juillet au 28 août 2016. Après une légère modification, elle sera disponible sur le site Internet de la Maison de l’environnement d’Orly et dans les mairies aux alentours. (2) Explications…

ORLY TRAVAUX P4 2016 1

Document 1 : ADP, « Aéroport Paris-Orly. Information sur les travaux de la piste 4 du 18 juillet au 28 août 2016 », Imprimerie spéciale Aéroports de Paris, avril 2016, 1/6 p. Brochure distribuée le 15 avril 2016 aux personnes présentes à la réunion organisée pour les riverains d’Orly. (2)


Deux phases de travaux sur la piste 4

La piste 4 (06/24) sera en travaux du 18 juillet au 28 août 2016 mais également en 2017, à peu près à la même époque. Puis, ce sera le tour de la piste 3 (08/26), certainement en 2018 et 2019. Pour des raisons opérationnelles et techniques, ils ne peuvent pas être réalisés en une seule fois. Les nouvelles normes européennes doivent être mises en place avant 2020. ADP finance 100 % des travaux. Une piste coûte à elle-seule 30 millions € environ.

La rénovation est liée aux conditions d’usure normale de l’infrastructure. L’enrobé de la piste 4 date de 2006, la durée de vie est d’environ 10 ans. Des zones sont abîmées avec des attaques liées à la météorologie et à l’usage de la piste. De ce fait, la maintenance est importante pour sécuriser cette piste. Franck MEYREDE rappelle que les rénovations de pistes sont nécessaires afin de maintenir la capacité opérationnelle de l’aéroport et la sécurité du personnel comme des voyageurs. Les avions roulent dessus à près de 250 km/h.

L’aire de sécurité d’extrémité de piste, dite RESA dans le jargon professionnel, sera prolongée de 200 m afin de réduire les risques. Les déplacements viaires et les cheminements de surveillances de piste avec leurs panneautages seront refaits à neuf.

ORLY N7 avril 2016

Orly, avion sur le taxiway au-dessus de la nationale 7. © Photographie SMM/PEE, 15 avril 2016.

En complément, un certain nombre de modifications à réaliser sont apparues. Elles sont liées en particulier aux réglementations européennes et à la mise en conformité des infrastructures et du balisage. Paris Aéroport profite de l’opportunité de cette rénovation pour améliorer la mise en sécurité de la piste en installant un nouveau système d’atterrissage aux instruments, appelé ILS de catégorie III. Il doit permettre une utilisation plus performante de la piste dans des conditions météorologiques particulières. Il augmentera la sécurité des appareils sur la plate-forme, quel que soit le sens d’atterrissage. Actuellement, il existe un système de radio navigation de chaque côté de la piste, mais ce nouvel ILS abaissera le seuil de visibilité de 800 m à 600 m.

La piste a été réalisée en 1963, rénovée en partie en 1995, puis en 2006 et 2009. Certaines zones sont vétustes. Les équipements électriques, les câblages, toutes les alimentations électriques et tous les systèmes qui permettent d’alimenter électriquement les pistes seront refaits en 2016-2017. Le but est de répondre à aux nouvelles normes européennes. Les travaux seront réalisés dans le cadre d’une démarche environnementale avec la technologie « leds » pour le balisage entièrement rénové. Sans caractère obligatoire, il sera procédé également à l’installation des feux d’indication de distance pour les pilotes.

Sur les six semaines de l’été 2016, les équipes travailleront 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, afin de comprimer le plus possible la gêne. La production de l’enrobé de la piste 4 sera réalisée sur place. Les déchets seront traités et réutilisés sur la plate-forme, notamment pour les chemins de ronde autour des clôtures. L’approvisionnement du chantier et la circulation des camions hors plate-forme seront planifiés afin de créer le moins de nuisances possible autour de l’aéroport. Frank MEYREDE précise qu’en France, le béton est peu employé pour les pistes contrairement à l’enrobé, il dure pourtant plus longtemps. La piste 3 est en béton ainsi que les taxiways (voies de circulation) et les parkings.

ORLY 15 avril 2016

Orly, avion sur le taxiway arrivant de la piste 3. © Photographie SMM/PEE, 15 avril 2016.

Actuellement, Paris Aéroport procède à des travaux nécessairement préalables à la rénovation des pistes comme ceux effectués sur les éléments de sécurité pour la circulation des avions sur la plate-forme.


Et pendant ce temps, comment fonctionnera l’aéroport ?

La piste 4 sera complètement fermée à l’exploitation durant les six semaines de l’été 2016. Seules la piste principale 3 (08/26) et piste 2 dite de secours (02/20) seront en activité. Paris Aéroport a élaboré le phasage de telle manière à optimiser le plus possible la durée des travaux. Il a été demandé aux compagnies aériennes de réduire l’activité durant ce temps. Un travail avec les compagnies a donc été effectué de façon à limiter à la baisse la programmation des vols sur la base du volontariat avec des déplacements ou des suppressions provisoires de vols. Le respect du couvre-feu et l’impact limité des travaux sur les opérateurs aériens ont été les deux cadres de ce phasage.

Le directeur d’Orly, Franck MEYREDE, insiste sur les aléas climatiques moins nombreux en été que lors des autres saisons. En 2006, les travaux ont duré 12 semaines, de fin mars à juin, avec des problèmes météorologiques. Pour cette nouvelle tranche de rénovation, la période estivale est la moins pénalisante pour Paris Aéroport. Pas pour les riverains, certes. Avant et après ces six semaines, le trafic étant plus important, le respect le couvre-feu n’aurait pas pu être fait. Il n’y aura pas de dérogation à celui-ci.

L’exploitation des pistes 3 et 2

MEEM DGAC TO 2016 2

Document 2 : Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, DGAC, « Travaux Orly. Piste 4 (06/24) du 18 juillet au 28 août 2016 », p. 3/14.

La piste 3 sera exploitée de façon unique : dans ce cadre, face à l’ouest et à l’est, l’atterrissage et le décollage se feront sur cette piste.

L’exploitation en pistes croisées a été choisie en pointe de trafic avec l’utilisation de la piste 2. Face à l’ouest, les atterrissages se feront en piste 3 et les décollages en piste 2. Les gros porteurs ne peuvent pas utiliser la piste 2 en raison de sa longueur plus courte que celle des pistes principales. Les gros porteurs, dans cette configuration, pourront également décoller en piste 3. Inversement, face à l’est, les décollages se feront en piste 3 et les atterrissages en piste 2.

En temps normal, seules deux conditions sont impératives pour l’utilisation de la piste 2 : 1/ les situations de vent selon un axe Nord-Sud ou Sud Nord (de 0 à 3 jours par an), quand il y a des vents forts dans cette direction-là, 2/ des travaux lourds sur une des pistes principales. Sans oublier les incidents majeurs sur les pistes principales obligeant Paris Aéroport à détourner les avions sur cette piste de secours. Durant la période de travaux, cet été, il n’y aura pas de trafic avant 7 heures le matin sur cette piste. Par contre, trois créneaux d’utilisation ont été définis : le matin, en début d’après-midi et le soir.

Nouvelles trajectoires de décollage et d’atterrissage

MEEM DGAC TO 2016 4

Document 3 : Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, DGAC, « Travaux Orly. Piste 4 (06/24) du 18 juillet au 28 août 2016 », p. 10/14.

Face à l’ouest, les trajectoires ressembleraient à celles des travaux de 2009, sachant que les flèches de couleurs verte et orange (sur le document 3 ci-dessus) représentent 90 % de la trajectoire en dessous de 2 000 m d’altitude. Ainsi, les avions décolleront de la piste 3 pour rejoindre la trajectoire habituelle (en orange sur le document 3 ci-dessus) empruntée lors d’un départ de la piste 4. En période de pointe, les avions décolleront de la piste 2 avec une dispersion trajectorielle différente (en vert sur le document 3 ci-dessus).

MEEM DGAC TO 2016 3

Document 4 : Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, DGAC, « Travaux Orly. Piste 4 (06/24) du 18 juillet au 28 août 2016 », p. 11/14.

Face à l’est, il est prévu des décollages en piste 3 comme actuellement, mais il est aussi prévu que l’atterrissage se fasse sur cette même piste avec une approche légèrement décalée par rapport à la situation actuelle (en bleu sur le document 4 ci-dessus). En période de pointe, les arrivées se feront en piste 2 (en vert sur le document 4 ci-dessus). Sur la cartographie, la zone bleue doit concerner 2/3 des vols, la zone verte 1/3 et en heures de pointe 90 %.

Dans cette configuration de travaux, Paris Aéroport est en mesure d’offrir aux compagnies des capacités opérationnelles réduites par rapport à une utilisation normale (avec les deux pistes principales). En piste unique, la capacité est de 45 mouvements par heure (25 atterrissages, 20 décollages). En pistes croisées, face à l’ouest, la capacité est de 25 arrivées et 25 départs. Face à l’est, elle passe à 30 atterrissages et 30 décollages (voir le document 2). Malheureusement, l’évaluation de l’impact sonore pour les populations survolées n’a pas été réalisée. Franck MEYREDE précise que les avions de nouvelle génération sont plus silencieux, l’impact dépend grandement du sens des vents. En été, les vents face à l’ouest et face à l’est sont généralement répartis équitablement sur la période. Ainsi, dans le Val d’Orge et pour le sud de l’Essonne, les habitants subiront plus de nuisances qu’en temps normal, où elles sont quasiment inexistantes.


Pour conclure, le directeur de l’aéroport d’Orly ayant assuré que le couvre-feu nocturne (entre 23 h 30 et 6 h) représente une partie de l’équilibre majeur de l’aéroport et des territoires riverains, il ne nous reste plus qu’à être très patient durant cette période de travaux…

On ne peut s’empêcher de s’interroger sur trois points lorsque le bâtiment de jonction entre Orly Ouest et Orly Sud – la fameuse 3e aérogare pour les associatifs – sera construit :
1. Quelle sera la durée de vie des pistes avec des avions de plus en plus lourds ?
2. Quelle sera la fréquence des travaux de rénovation ?
3. Quel sera l’impact sur les populations riveraines et survolées ? N’ont-elles pas, de façon prémonitoire, raison de s’inquiéter cette nouvelle construction ? L’avenir nous le dira.

RÉFÉRENCES
1. Lire également l’article d’annonce de Marie LAPEIGNE, « Aéroport d’Orly. Travaux sur les pistes en 2016 : de l’acceptabilité du bruit au vacarme assourdissant », www.portes-essonne-environnement.fr, 7 avril 2016 : http://portes-essonne-environnement.fr/aeroport-dorly-travaux-sur-les-pistes-en-2016-de-lacceptabilite-du-bruit-au-vacarme-assourdissant/.
2. Document 1 : DGAC, Aéroports de Paris (ADP), « Aéroport Paris-Orly. Information sur les travaux de la piste 4 du 18 juillet au 28 août 2016 », Imprimerie spéciale Aéroports de Paris, avril 2016, 6 p (pdf) : ORLY TRAVAUX P4 2016.
Cette brochure doit être modifiée en raison du changement de dénomination de la branche « services aux voyageurs » d’ADP en  « Paris Aéroport. Paris vous aime ». ADP a choisi une marque commerciale par aéroport, endroit unique où il faut accueillir de manière unique le voyageur.. La brochure sera mise en ligne et téléchargeable sur www.entrevoisins.org. Un numéro vert est ouvert : 0 805 712 712.
3. Documents 2 à 4 : Ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, DGAC, « Travaux Orly. Piste 4 (06/24) du 18 juillet au 28 août 2016 », 14 p. (pdf) : MEEM DGAC TO 2016.

© Marie LAPEIGNE, Orly, 27 avril 2016, 21 h 30.