Taxis volants au-dessus de Paris en 2024 : un inquiétant projet soumis à enquête publique

Les Jeux olympiques de Paris en 2024 agitent les esprits. Leur organisation justifie aussi bien des projets touristico-sportifs ponctuels sans lendemain, couteux et créateurs de pollutions et de nuisances, que des réalisations structurantes ayant la capacité d’améliorer de façon durable les conditions de vie de ceux qui y vivent et y travaillent tout au long de l’année.

Comment faire le tri entre l’utile et l’inutile, entre le bénéfique le nocif pour l’environnement et la qualité de vie ? Telle est la question citoyenne qui doit être posée à l’occasion de l’enquête publique ouverte par la Préfecture de la région d’Ile-de-France sur l’inquiétant projet d’aménagement d’un héliport en plein coeur de Paris, quai d’Austerlitz, destiné à accueillir des taxis volants. Comme s’il était désormais admis comme normal que les villes soient survolées à basse altitude, jour et nuit, par des Objets Volants Identifiés Indésirables (O.V.I.I.).

Un projet élitiste et absurde

Il est souhaitable que le plus grand nombre de citoyens prenne connaissance du dossier qui, par ses implications et de ses conséquences, est à contresens de l’évolution souhaitable des mobilités urbaines.

Alors que l’évolution des déplacements urbains se dirige à grande cadence vers des modes doux et/ou collectif, ce projet est porteur à son paroxysme d’une individualisation et d’un élitisme concernant un moyen de transport qui, utilisant l’espace public, a ‘abord une vocation publique, c’est-à-dire d’être ouvert à tous. Le prix de « la course » du taxi volant est estimé à 150€, ce que le directeur d’Aéroport de Paris estime avantageux par rapport à la course en taxi automobile…

L’empreinte énergétique est de toute évidence considérable. Le bruit des survols (pollutions sonores) est inévitable et il subsiste un risque incompressible d’accident et de chute sur les populations survolées. Ce moyen de transports présente tant d’absurdités environnementales et sociales au point qu’il est difficile de croire qu’il ne s’agit pas d’un canular.

CONCLUSION

De tels moyens de transport (pour qui ?) n’ont pas leur place dans nos villes. Ils ne l’ont pas davantage dans nos campagnes.

RÉFÉRENCES DE L’ENQUÊTE PUBLIQUE :

https://www.prefectures-regions.gouv.fr/ile-de-france/Documents-publications/Consultations/Enquetes-publiques/Enquete-publique-Vertiport-experimental-Quai-d-Austerlitz-Paris-13eme


Portes de l’Essonne Environnement
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Nourrir les oiseaux des jardins

Nourrissage d’oiseaux de jardin (c) 2022 Jean-Marie CORBIN pour l’association Portes Essonne Environnement

Les froids de l’hiver approchent, les petits animaux ont froid et ont du mal à se trouver de quoi se nourrir. Certains comme les hérissons hibernent mais les oiseaux des jardins non migrateurs subissent la dureté de l’hiver. Il y a beaucoup de pertes pour ces braves petits piafs alors qu’ils participent activement à la régulation de la biodiversité au printemps et en été en consommant une grande quantité d’insectes qui parasitent nos arbres fruitiers.

Dès que les températures sont inférieures à 10°C, un supplément nutritif est le bienvenu. Si vous êtes amateur de fromage, les croutes de fromage réduites en petits morceaux sont les bienvenues mais cela ne suffira à nourrir toute la troupe céleste environnante.

Tout d’abord, il faut organiser le « couvert », c’est-à-dire disposer une mangeoire. La mangeoire se trouvera en hauteur dans un arbre de manière à ce que le ravitaillement de nos petits amis soit sécurisé et ne soit pas une cible trop facile pour ces enfoirés de sales greffiers. Une boîte en bois percée de 2 trous de diamètre 63 et munie d’un couvercle transparent est bon début. Elle sera fixée ou posée sur l’arbre. Les rouges-gorges, les mésanges, les pinsons et même les pigeons (je n’aime pas trop ces derniers) iront s’y nourrir.

On peut y disposer du grain pour les moineaux de passage s’il y en a dans le secteur. Les pinsons semblent aussi être granivores.

Par contre, les mésanges préfèrent le tournesol et les cacahouètes. Pour le tournesol, il convient d’utiliser une mangeoire cylindrique. Le modèle transparent avec 2 trous à la base convient parfaitement. On peut y mettre soit un mélange cacahouète et tournesol soit du tournesol pur. Le modèle à grillage à fine mailles ne convient pas ni pour le tournesol qui passe à travers ni pour les cacahouètes entières à décortiquer.

On pourra compléter avec des boules de graisse où les mésanges iront picorer selon leur besoins. Attention à ne pas mettre que des boules de graisses car ces petites bêtes sont aussi sensibles que nous aux problèmes de santé conséquents à une alimentation trop grasse. La boule de graisse pourra être abritée avec un couvercle afin d’éviter une dégradation trop rapide avec le ruissellement de la pluie.

Le filet de cacahouète, disposé avec un couvercle par-dessus, sera là plus pour le divertissement. En effet, les mésanges savent fort bien percer les coques des cacahouètes pour se régaler de l’intérieur mais il faut aussi savoir que cela leur prend du temps et les journées d’hiver sont courtes …

Toutefois nourrir des animaux avec des cacahouètes n’est pas forcément une bonne idée. En effet, les arachides d’où viennent cacahouètes, poussent dans le sol comme les tubercules de pommes de terre et ce ne sont pas des plantes qui poussent sous nos latitudes. C’est donc totalement inconnu de nos oiseaux de jardin non migrateurs.

Concernant les mélanges pour oiseaux, il y en a de différentes sortes. Les mélanges universels ne sont pas formidables car ils contiennent trop de graines qui n’intéresseront pas certains oiseaux communs des jardins comme les mésanges. Pire, lorsque des graines diverses seront mélangées avec du tournesol, les mésanges iront jeter au sol, les graines qui ne leur plaisent pas pour atteindre et sélectionner que les graines de tournesol. Par ailleurs, en dehors des moineaux, je n’ai pas remarqué de la part des autres oiseaux un intérêt pour ces mélanges.

Note : je n’ai absolument pas du tout envie de nourrir les pigeons et les perruches à collier ou perruches vertes. Ces dernières sont une espèce très invasive, qui à mon avis, devrait être régulées d’une manière très ferme vu les nuisances occasionnées avec la destruction d’espèces locales (encore un point de désaccord avec le discours officiel des khmers verts aux idéologies complètement hors-sol).

Pour les graines de tournesol, il y en a de toutes sortes de conditionnement dans le commerce. Le mélange cacahouète plus tournesol Bites for Bird  chez Action est à 0,99€ les 300g soit 3,30€/kg. C’est un bon début mais on s’apercevra que ça part asse vite. J’ai également remarqué que certains sachets ne contenaient pas 300g de nourriture mais seulement 275g.

Après avoir regardé chez Truffaut et chez Gamm Vert, les graines de tournesol sont vendues aux alentours de 40€ les 12,5kg soit 3,20€/kg ce qui n’est pas donné. J’ai eu la bonne surprise de trouver chez Leclerc des sachets Pictou (produit français) de 3kg de graines de tournesol à 5,09€ soit 1,70€/kg ce qui est un très bon prix vu la spéculation environnant le tournesol et dont l’Ukraine est un des producteurs majeurs.

Enfin, si nourrir nos petites bêtes, est une belle intention n’oubliez pas qu’une fois l’alimentation commencé, il faut réapprovisionner régulièrement jusqu’à la fin de l’hiver et qu’il ne faut pas que cela se fasse au détriment d’autres espèces animales là où sont cultivées les graines achetées dans le commerce. À ce sujet, je ne dispose d’aucune information attestant que les pays de l’Est et notamment l’Ukraine très orientée vers l’agriculture intensive soient particulièrement respectueux de l’environnement et de la biodiversité.

Une fois les repas bien préparés et bien servis, posez donc soit une caméra de chasse soit carrément une caméra de surveillance adossée à un enregistreur à disque dur. Vos observations, en plus d’être une distraction très agréable, vous permettront d’adapter matériels et nourritures au plus près des besoins de nos petites bêtes. À ce propos, la caméra restera en veille la nuit car les rats de passage sont largement capables de grimper aux arbres pour subtiliser la nourriture destinée aux oiseaux.

Collecte de déchets électriques et électroniques (DEEE)

Ce samedi 16 octobre avait lieu une collecte de déchets et électroniques (DEEE) à Savigny-sur-Orge. Notons au passage, un petit cafouillage parmi un des dix membres du service communication de la mairie puisque le site internet de la mairie indiquait une collecte aux services techniques situé à la ZAC des Gâtines alors que la flyer papier donnait rendez-vous sur le parking du gymnase à Grand-Vaux. En définitive, un agent municipal a été dépêché, le temps de la collecte à Grand-Vaux avec une fourgonnette pour collecter les DEEE.

En volume, les apports furent assez conséquents comme l’atteste la photo.

Néanmoins, les appareils semblent être de conception bien ancienne, ils auront donc peu de chance de retrouver le circuit du réemploi même s’ils sont en bon état ou sont facilement réparables. Les matériels collectés sont envoyés à une association de recyclage et/ou de valorisation située à Trappes (est-ce la SIAE ENVIE ? Cela reste à confirmer)

Pour rappel, il existe d’autres possibilités pour le particulier de se séparer de ses DEEE soit par apport volontaire en déchetterie, ou dans la plupart de grandes surfaces, soit par via une collecte à domicile à la demande en contactant Allorécup’ au 01 78 18 22 24 (dechets.secteursud@grandorlyseinebievre.fr).

Les DEEE collectés en fin d'après midi sur le parking de Grand-Vaux
Les DEEE collectés en fin d’après midi sur le parking de Grand-Vaux

L’éco-socialisme démocratique remplacera-t-il le capitalisme ? (Vishwas Satgar)

« Les robinets du pétrole ne seront fermés que lorsque le dernier dollar sera extrait de cette ressource mortifère » écrit le sociologue Vishwas SATGAR (1). Pour lui, il ne faut pas se cacher que la logique du capitalisme contemporain ne relève pas seulement de la prédation des biens naturels, mais d’un écocide « c’est-à-dire d’un anéantissement des conditions nécessaires au maintien de la vie humaine et non humaine sur la planète Terre ».

Un sourire pour l’année 2021. Tag urbain. Plaque d’égout peinte à la bombe de peinture bleu, au milieu de la chaussée, rue de la Liberté (au droit de la rue Édouard Ferron) à Savigny-sur-Orge (Essonne), 30 décembre 2020. © Photographie Bernard Mérigot / CAD.

Qualifier le pétrole de substance « mortifère » (qui provoque la mort) constitue un raccourci militant. Il exprime en un mot que l’exploitation et l’utilisation de cette énergie fossile, par les pollutions qu’elle produit, portent atteinte à l’environnement, détériorent la santé humaine, et dégradent le climat.
Vishwas SATGAR enseigne les sciences politiques et la sociologie à l’université de Witwatersrand en Afrique du Sud. Surnommée en abrégé « Wits University », c’est la plus importante université du pays (30 000 étudiants). Elle a été créée à Johannesburg en 1896. Le prix Nobel de la Paix Nelson MANDELA y a étudié et enseigné. Trois autres prix Nobel, Aaron KLUG (Chimie), Nadine GORDIMER (Littérature) et Sydney BRENNER (Physiologie/médecine), mais aussi Johnny GLEGG, y ont été professeurs.

Les analyses sur l’état économique et social du monde développées par les universitaires non-européens sont, d’une façon générale, moins frileuses, et plus déterminées que celles de nombre de « spécialistes » français et européens. Ils s’affranchissent plus librement d’un conformisme ambiant à l’égard des systèmes en place, comme si leur appartenance au continent africain, asiatique ou sud-américain, et aux réalités quotidiennes de leurs territoires en développement conjugués, les amenaient à prendre des positions militantes pour l’avenir, tirant des conclusions apportées par les  sciences humaines et sociales qu’ils enseignent.

Il en est ainsi à l’égard de l’écologie et du réchauffement climatique qui ne saurait plus aujourd’hui constituer un sujet de débat – vous savez, la fameuse et imbécile question « le climat se réchauffe, ou ne se réchauffe-t-il pas ? » que nous entendons depuis si longtemps. Ces questions sont désormais entrées  dans le domaine d’actions positives qui fait consensus. Ses fondements sont enseignés et ses implications pratiques sont déclinées  par de nombreuses recherches universitaires dans diverses disciplines.

SATGAR Vishwas (Ed), The Climate Crisis. South African and Global Democratic Eco-Socialist Alternatives, Wits University, South African Republic, 2018, ISBN: 9781776142071

Le changement climatique s’accélère.

« Dans le monde contemporain du capitalisme centré sur le carbone, les voitures gourmandes en essence, les avions de haute technologie avancée, et les gigantesques porte-conteneurs et les gratte-ciels, tous consommateurs d’énergie, constituent des armes de destruction massive.
Plus les relations sociales basées sur une consommation intensive de ressources et centrées sur le carbone prévalent, plus le changement climatique s’accélère. »
(p. 13)

Vishwas SATGAR propose une évidence que l’on ne peut rejeter : la logique du capitalisme contemporain, qui est fondé sur un mode d’appropriation et d’accumulation de biens, est un mode d’anéantissement progressif des conditions nécessaires au maintien de la vie humaine et non humaine sur la planète Terre

« Il est sidérant de constater que le capital carbone conserve encore sa place dans le mix énergétique mondial,
•   malgré tous les signaux d’alarme lancés par les sciences du climat,
•   malgré le ralentissement de la demande lié à la pandémie Covid-19,
•   malgré les évènements climatiques extrêmes qui se produisent chaque semaine sur la planète Terre. »

Les défenseurs de la justice climatique développent trois formes d’action de rupture :

  1. La rupture symbolique avec la normalité. Tout le monde pense à Greta THUNBERG et aux actions de protestation que la jeune génération mène autour de #FridayForFutur. Il est urgent de prendre en compte les données de la science sur le climat.
  2. La rupture tactique par le blocage de la production de carbone : extraction des combustibles fossiles, boycott de MacDonald’s, Walmart, Subway… qui ont des intérêts dans l’agriculture sur brûlis en Amazonie, blocage des mines de charbon en Allemagne…
  3. Rupture stratégique du capitalisme écocide en proposant des alternatives systémiques (« Green New Deals », Pactes verts).

La triple violence coloniale, néolibérale et impérialiste n’a pas réussi à détruire l’attente d’une relation désaliénée avec le monde, garanties par un humanisme positif et un monde lent, fondé sur les cycles métaboliques de la nature.

CONCLUSIONS

  • L’éco-socialisme est une vision qui se pose à tous les niveaux des gouvernances territoriales. Aucune des gouvernances imbriquées ne doit attendre les autres. Chacune doit prendre sans tarder des initiatives.
  • Les biens communs mondiaux (l’eau, la terre, la biodiversité, les océans, la biosphère…) sont impliqués dans la revanche de la nature contre l’écocide capitaliste : à l’infinité de la nature s’oppose, au-delà de la finitude individuelle des humains, cette autre infinitude qui est la croyance dans l’infini d’un destin partagé.
  • Ces idées qui doivent s’imposer, internationalement, nationalement et localement et commander quotidiennement les actions concrètes d’une écologie intégrale.

Vishwas SATGAR, The Climate Crises and Democratic Eco Socialist Alternatives, 1 March 2018. Video Youtube https://www.youtube.com/watch?v=dfxrZuG7nwI


RÉFÉRENCES

SATGAR Vishwas, « Après le capitalisme, l’éco-socialisme démocratique ? », Dialogue global, International Sociological Association (ISA), 2020/3, pp. 13-15.
Vishwas SATGAR est professeur de Sociologie à l’Université du Witwatersrand (Afrique du Sud). Membre du Comité de recherche de l’International Sociological Association (ISA).

SATGAR Vishwas, The Climate Crisis. South African and Global Democratic Eco-Socialist Alternatives, Wits University, South African Republic, 2018, ISBN: 9781776142071
(Subjects: Earth and Environmental Sciences, Climatology and Climate Change).

SATGAR, Vishwas The Climate Crises and Democratic Eco Socialist Alternatives, 1 March 2018. Video Youtube https://www.youtube.com/watch?v=dfxrZuG7nwI

COMMENTAIRE DES ILLUSTRATIONS

  • Un sourire pour l’année 2021. Tag urbain. Plaque d’égout peinte à la bombe de peinture bleu, au milieu de la chaussée, rue de la Liberté (au droit de la rue Édouard Ferron) à Savigny-sur-Orge (Essonne), 30 décembre 2020. © Photographie Bernard Mérigot / CAD.
  • SATGAR Vishwas (Ed), The Climate Crisis. South African and Global Democratic Eco-Socialist Alternatives, Wits University, South African Republic, 2018, ISBN: 9781776142071
  • Vishwas SATGAR, The Climate Crises and Democratic Eco Socialist Alternatives, 1 March 2018. Video Youtube https://www.youtube.com/watch?v=dfxrZuG7nwI

© Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT et Bernard MÉRIGOT. Article mis en ligne le 18 février 2021.

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Réchauffement climatique : l’État français a manqué à ses obligations. Le texte complet du jugement du Tribunal administratif de Paris du 3 février 2021 (Oxfam France)

« L’État versera à l’association Oxfam France, l’association Notre Affaire à Tous, l’association pour la Nature et l’Homme, l’association Greenpeace France la somme d’un euro chacune en réparation de leur préjudice moral » peut-on lire dans le jugement du Tribunal administratif de Paris rendu le 3 février 2021. (Article 3 du jugement, p. 38)

Fumées de cheminées d’usine, Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), 14 décembre 2016. © Photographie Bernard Mérigot pour PEE.

Le jugement du 3 février 2021 fait suite à un recours déposé par plusieurs associations (Association Oxfam France, Association Notre Affaire à Tous, association pour la Nature et l’Homme, Association Greenpeace France). Elles demandaient notamment  :

  • « d’enjoindre au premier ministre et aux ministres compétents de mettre un terme à l’ensemble des manquements de l’État à ses obligations – générales et spécifiques – en matière de lutte contre le changement climatique » (p. 1),
  • « de prendre les mesures nécessaires aux fins de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère (…) à un niveau compatible avec l’objectif de contenir l’élévation moyenne de la planète en-dessous du seuil de 1,5 ° »
  • « de prendre les mesures nécessaires à l’adaptation du territoire national ».

De mauvais esprits se sont empressés de minimiser à la fois la portée et la validité du jugement du Tribunal administratif. De tels propos, profondément irresponsables (« Je n’en sais rien, mais je suis compétent pour donner mon avis à tout le monde ») relèvent de la dénégation à l’égard d’une réalité scientifique établie.

Les conséquences de ce jugement sont considérables, pour les citoyens, les élus, les administrations, les juristes. Et ce, quels que soient les épisodes à venir de ce feuilleton judiciaire qui demeure « à suivre ».  La publication de référence des professionnels du droit administratif, l’ Actualité juridique de Droit administratif (AJDA) publiée par Dalloz à titré à ce sujet : « Le préjudice écologique reconnu dans l’« Affaire du Siècle». (1)
On retiendra qu’en 2021, pour la première fois, la justice a reconnu le bien-fondé des revendications citoyennes portées par des associations en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

La Justice a donc reconnu « Au nom du peuple Français »,  le non-respect « de la trajectoire de réduction des gaz à effet de serre que l’État a lui-même établi ». La France a pris divers engagements internationaux (comme l’Accord de Paris en 2015) pour limiter ses émissions de gaz à effet de serre, et atteindre un bilan neutre en 2050. (2) Dans ce but, elle s’est fixée une trajectoire :

  • – 1,5 % de réduction des émissions chaque année, pendant cinq ans, de 2016 à 2025,
  • 3,2 % chaque année pendant vingt-cinq ans, de 2025 à 2050.

Pour ce faire, l’amélioration de l’efficacité énergétique, est déclinée selon deux grandes actions :

  • d’une part, par la baisse de la consommation énergétique,
  • d’autre part, par l’amélioration de l’efficacité énergétique.

Or, aucun de ces objectifs n’a été atteints durant les quatre années de la période 2015-2019, comme l’atteste l’observatoire climat-énergie, et comme le reconnaît le gouvernement lui-même.

  • Le budget carbone a été dépassé de + 4 %.
  • En 2018 et 2019, la réduction des gaz à effet de serre n’a atteint que – 0,9 %.

Ce non-respect des plafonds d’émissions fixés par la Stratégie Nationale Bas-Carbone se manifeste dans presque tous les secteurs :

  • transports (en 2017, 10,6 % de dépassement),
  • bâtiment (22,7 %) et
  • agriculture (3,2 %).

Les associations soutiennent que ces résultats ne correspondent pas aux objectifs fixés et qu’il est impératif d’effectuer un suivi véritable pour évaluer les mesures mises en œuvre afin de respecter les engagements pris.

Dans son rapport de juillet 2020, le Haut Conseil au Climat relève qu’au vu des objectifs poursuivis. les actions climatiques engagées sont insuffisantes. La trajectoire fixée par le gouvernement ( – 40 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030) doit être beaucoup plus contraignante pour parvenir aux résultats annoncés.

Jugement du Tribunal administratif de Paris rendu le 3 février 2021. Lutte contre le changement climatique (38 pages). Archives Portes de l’Essonne Environnement. Pdf du texte complet Jugement TA 03 02 2021 Oxfam

« L’Affaire du siècle » demeurera comme étant le nom de la campagne de protestation contre le manque de résultats obtenus par l’État français en matière de lutte contre le réchauffement climatique qui a été initiée en France le 17 décembre 2018 par quatre associations (Fondation pour la nature et l’homme, Greenpeace France, Notre affaire à tous, Oxam France) et qui a poursuivi en justice l’État pour son inaction en matière de lutte contre l’émission de gaz à effet de serre.

  • Une pétition collecte en 2019 deux millions de signatures en un mois. Les réponses apportées par le gouvernement (Emmanuel MACRON, président (depuis 2017) ; Édouard PHILIPPE, Premier ministre (2017-2020); François de RUGY, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (2018-2019) étant jugées insuffisantes, un recours en justice contre l’État est déposé auprès du Tribunal administratif de Paris le 14 mars 2019.
  • Le 3 février 2021, le Tribunal administratif rend son jugement. Celui-ci reconnait la faute de l’État, en lui laissant deux mois pour soumettre des observations avant de se prononcer sur l’injonction à agir.

Cette action se situe dans le domaine de la justice climatique qui désigne les approches éthiques et morales et politiques du dérèglement climatique. Elle désigne notamment les plaintes et actions juridique déposés pour action insuffisante contre le changement climatique. Dans le monde, entre 2006 et 2019, plus de 1 300 plaintes relatives au Climat ont été déposées dans une trentaine de pays, parfois par des enfants. Les accusés sont surtout les gouvernements, mais les actions en justice visent de plus en plus les grandes entreprises qui sont de sont de grandes émettrices de gaz à effet de serre.

Comme l’écrit Cyril LEMIEUX, à propos d’un autre combat environnemental historique, celui qui a été mené pour « rendre visible » les dangers du nucléaire, la « sociologie de la mobilisation classique, en ignorant tout à la fois le travail de mise en visibilité de certaines réalités qui est poursuivi par les acteurs inquiets ou protestataires, et les multiples répercussions que ce travail tend à avoir dans la manière dont les tiers perçoivent leur environnement et s’y engagent, elle sous-estime les capacités d’auto-transformation du monde social. » (3)


CONCLUSIONS

Que devenons-nous retenir ?

  • Que le réchauffement climatique est une réalité à laquelle aucun territoire, quel qu’il soit, n’échappe.
  • Que tous les territoires sont concernés et obligatoirement solidaires. Il existe un ruissellement des responsabilités à tous les étages de l’emboitement territorial (État, régions, répartements, métropoles, intercommunalités, communes…). Les engagements qui incombent à l’État incombent  à tous. Personne ne peut plus s’amuser au petit jeu du « c’est pas moi, c’est l’autre…».
  • Qu’il est devenu intolérable que les engagements des collectivités publiques, des services publics, des entreprises ne soient pas conduits à leur terme et n’aboutissent pas aux résultats annoncés. Aucune collectivité ne peut se dérober. Nous sommes dans une « écologie de résultat ».
  • L’expertise citoyenne et associative en matière de transition climatique n’est en rien inférieure à celle de l’État. Elles doivent être reconnues à égalité à leur juste place en leur accordant une égale légitimité.

Tribunal administratif de Paris. En-tête.


RÉFÉRENCES

1. PASTOR Jean-Marc, « Le préjudice écologique reconnu dans l’« Affaire du Siècle». Le tribunal administratif de Paris reconnaît la carence partielle de l’État à respecter les objectifs qu’il s’est fixés en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre », Dalloz actualités, 4 février 2021. https://www.dalloz-actualite.fr/flash/prejudice-ecologique-reconnu-dans-l-affaire-du-siecle#.YB_BT2PjK88

2. Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) du 9 mai 1992.
Accord de Paris du 12 décembre 2015 prévoyant les mesures nécessaires pour lutter contre le changement climatique (notamment en limitant les émissions de gaz à effet de serre).

3. LEMIEUX Cyril, « Une contribution à la Sociologie de la mobilisation. Rendre visible les dangers du nucléaire », Laboratoire, École des Hautes études en Sciences Sociales (EHESS). http://lier.ehess.fr/docannexe/file/2399/2008_dangers_nucle_aire.pdf
Cyril LEMIEUX est maître de conférences à l’EHESS, membre du Groupe de Sociologie Politique et Morale de l’Institut Marcel Mauss (CNRS-EHESS).

HAUTEREAU-BOUTONNET Mathilde, « Affaire du siècle » : les promesses climatiques risquent d’engager ceux qui les font, The Conversation, 7 février 2021. https://theconversation.com/affaire-du-siecle-les-promesses-climatiques-risquent-dengager-ceux-qui-les-font-154800?
Mathilde HAUTEREAU-BOUTONNET est Professeur de droit, Aix-Marseille Université (AMU)


LÉGENDES DES ILLUSTRATIONS

  • Fumées de cheminées d’usine, Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), 14 décembre 2016. © Photographie Bernard Mérigot pour PEE.
  • Jugement du Tribunal administratif de Paris rendu le 3 février 2021. Lutte contre le changement climatique (38 pages). Archives Portes de l’Essonne Environnement. Pdf du texte complet Jugement TA 03 02 2021 Oxfam
  • Tribunal administratif de Paris. En-tête.

© MONNIOTTE-MÉRIGOT Sylvie, MÉRIGOT Bernard. Article mis en ligne le 7 février 2021.

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