Ce 5 décembre 2015, ouvrant nos volets, quelle ne fût pas notre surprise en découvrant sur le poirier des perruches faisant leur toilette en lieu et place du gentil écureuil qui saute d’arbre en arbre quasi quotidiennement dans notre jardin !
Perruche sur un poirier de Savigny-sur-Orge, le 5 décembre 2015. © SMM/CAD pour PEE.
Or, ces jolies perruches sont une véritable catastrophe pour les habitants de nos jardins franciliens. Jugeons-en en relisant l’article ci-dessous de Philippe MARTINOT, publié le 4 avril 2012 dans le Figaro.fr. (1)
DOCUMENT
« Des perroquets parisiens sous haute surveillance
Arrivée en France dans les années 1970, la très exotique perruche à collier pourrait, à terme, menacer la survie d’espèces locales.
Comme son cousin le perroquet, la perruche à collier est capable, en captivité, d’imiter la voix humaine. On la connaissait déjà à Rome, à l’époque de Jules César où un oiseau doué pouvait coûter plus cher qu’un esclave. Haute d’une quarantaine de centimètres, elle est dotée d’un magnifique plumage vert printemps, d’une longue queue tirant sur le turquoise et pour les mâles, d’un collier noir. Côté ramage, avec son bec rouge foncé, crochu et puissant, elle jacasse bruyamment et peut aussi siffler. Depuis trente ans, insidieusement, elle a entrepris de mettre sa touche de couleur et d’exotisme dans les parcs, bois et jardins franciliens.
À Antony, les habitants d’une résidence sont partagés. Depuis quelques années, une colonie a élu domicile dans le parc. Si l’oiseau et ses couleurs chatoyantes ravissent quelques habitants qui parfois les nourrissent, les déjections qui s’accumulent sur les voitures garées en contrebas ne sont pas du goût de leurs propriétaires…
Reine de l’évasion, les Anglo-Saxons l’ont surnommée la perruche Houdini. C’est d’ailleurs ainsi qu’elle est arrivée sous nos latitudes. Une cinquantaine d’individus se seraient échappés d’un conteneur sur la zone aéroportuaire d’Orly en 1974. Le scénario s’est reproduit dans les années 1990, à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, cette fois. Depuis, ces perruches sont nombreuses à se regrouper en dortoir la nuit venue à Wissous (91) à quelques kilomètres à vol d’oiseau d’Orly ainsi qu’à Roissy (95) en bordure des pistes. Selon la Ligue de protection des oiseaux (LPO), on dénombrerait aujourd’hui près de 1 500 individus en Ile-de-France.
Elle délogerait les écureuils
On peut en apercevoir au parc de Sceaux, au parc de la Vallée-aux-Loups à Châtenay-Malabry, dans le bois de Vincennes et au parc Montsouris. En Grande-Bretagne, où elle est apparue à la fin des années 1960, la population de perruches à collier s’élève désormais à 20 000 individus environ, dont 10 000 pour Londres et sa banlieue ! Et on la trouverait jusqu’au sud des Highlands. Dans le reste de l’Europe une colonie de 10 000 individus vit dans la région bruxelloise. On la retrouve aussi à Zurich, Hambourg, Barcelone… Psittacula krameri manillensis est le psittacidé le plus répandu dans le monde. Celles qui se sont adaptées à notre pays sont originaires du sous-continent indien. Là-bas, elle est considérée comme nuisible. Elle mange en abondance des fruits et des graines. Elle serait responsable de la perte de près de 20 % des récoltes de maïs.
Depuis 2008, Natural England, l’observatoire de la faune britannique, a mis l’oiseau sous surveillance et autorise, sous condition, un propriétaire foncier à le tirer sans demander un permis.
Xavier Japiot, ornithologue à Paris Nature, le pôle biodiversité de la Mairie de Paris, explique qu’en France cet oiseau ne bénéficie d’aucun statut particulier. Cela n’empêche pas que certains ornithologues soient inquiets: la perruche à collier cause des dommages aux cultures, surtout aux arbres fruitiers, dans son aire de nidification naturelle. De plus, l’oiseau, cavernicole, est soupçonné de chasser d’autres espèces nichant dans les cavités comme les pics, les sittelles, les étourneaux voire les chouettes et même les écureuils. En Ile-de-France, des ornithologues surveillent avec attention la progression de l’oiseau. Si l’état actuel et l’impact de cette population restent faibles, des études estiment cependant qu’elle pourrait être multipliée par dix dans les dix ans qui viennent. Parmi les mesures envisagées, ils préconisent de proscrire le nourrissage direct par le public, cause de la prolifération sauvage des espèces exotiques. Une mesure de bon sens, pour éviter que la perruche à collier ne devienne une «peste» céleste.
RÉFÉRENCE
1. MARTINOT Philippe, « Des perroquets sous haute surveillance », Le Figaro, 4 avril 2012 (http://www.lefigaro.fr/environnement/2012/04/03/01029-20120403ARTFIG00710-des-perroquets-parisiens-sous-haute-surveillance.php).
© Bernard MÉRIGOT, 5 décembre 2015.