Le 27 janvier 2014, Victor HAÏM a jeté un pavé dans la mare en déclarant à Latribune.fr : « Si on peut s’engager auprès des riverains sur une diminution du bruit, on peut avoir une augmentation du trafic », rappelant que ce trafic aérien pourrait doubler d’ici à 2030 et passer à 450 000 survols des riverains. (1) Ainsi, donc, le président de l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) songe-t-il fortement à éradiquer le décret de 1994 limitant à environ 200 000 mouvements et fixant à 250 000 le nombre de créneaux horaires attribués à Paris-Orly ! (2)
Allons plus loin dans le raisonnement de M. HAÏM. Après le déplafonnement, il faudra supprimer le couvre-feu nocturne (23h30 – 6h) acquis en 1968 et ouvrir d’autres pistes (3). Car, les contrôleurs aériens auront bien du mal à faire décoller et atterrir deux fois plus d’avions dans le même laps de temps, sur le même nombre de pistes !
MOINS DE BRUIT = PERMISSION DE FAIRE SAUTER LE VERROU DE 1994
Autant dire que l’article numérique de Fabrice GLISZCYNSKI, au goût provocateur, n’est pas passé inaperçu auprès des associations de défense des populations survolées. Il faut dire que la principale argumentation du président de l’ACNUSA est particulièrement cynique et indécente. Il lance l’idée de pollution sonore à volume global constant. En d’autres termes, les avions faisaient du bruit auparavant, laissons-les en faire ad vitam aeternam ! Oublie-t-il que le problème des avions siffleurs (de la famille des A320) est à peine résolu après 12 ans de combat associatif ? (4) Et, qu’en est-il de l’augmentation de la pollution chimique liée à l’accroissement du trafic ? Mystère !
RESPECTER L’ARTICLE 1 DE LA CHARTE DE L’ENVIRONNEMENT
Dès le 30 janvier 2014, l’Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA) a publié un communiqué dont la teneur est à la hauteur des propos relatés par le président de l’ACNUSA. (5) Le Forum sud-francilien contre les nuisances aériennes (FCNA) a rencontré la sénatrice Claire-Lise CAMPION afin de l’interpeler sur le sujet. Le 8 février 2014, le FCNA, la fédération Essonne Nature Environnement (ENE) et Portes de l’Essonne Environnement (PEE) se sont entretenus avec l’attaché parlementaire d’Éva SAS, députée EELV-PS de la 7e circonscription, afin qu’une question orale ou écrite sur le déplafonnement envisagé par l’ACNUSA soit posée le plus rapidement possible au gouvernement.
Document : Fabien HERRAN, « Nuisances aériennes : les associations en alerte », Le Républicain Nord-Essonne, 13 février 2014, p. 9. (6)
En aucun cas les riverains et leurs porte-paroles associatifs ne laisseront Aéroports de Paris (ADP), avec la complicité de l’ACNUSA et de l’État, passer en force un projet de développement et de modernisation d’Orly avec à la clé la disparition du décret de 1994. (7) Cela augurerait d’une atteinte sans limite à la qualité de vie et à la santé de centaines de milliers de Sud-Francilens. Alors, se poserait la question de la cohérence avec l’article 1 de la Charte de l’environnement inscrite dans la Constitution française : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. » (8)
SOURCES
1. Fabrice GLISZCZYNSKI, « Déplafonnement d’Orly, et si une porte s’ouvrait ? », Latribune.fr, 27 janvier 2014.
2. Arrêté ministériel du 6 octobre 1994 relatif aux créneaux horaires sur l’aéroport d’Orly.
Arrete ministeriel Orly 1994 (pdf)
3. Décision ministérielle du 4 avril 1968 relative au couvre-feu nocturne à Orly.
Decision ministerielle Orly 1968 (pdf)
4. Association de défense contre les nuisances aériennes (ADVOCNAR), « 12 ans de combat associatif pour réussir à corriger un défaut des Airbus A320 », communiqué de presse du 22 janvier 2014 (www.advocnar.fr).
5. UFCNA, « Aviation commerciale », communiqué de presse du 30 janvier 2014 (www.ufcna.eu).
Communiqué de l’UFCNA du 30 janvier 2014 (pdf)
6. Fabien HERRAN, « Nuisances aériennes : les associations en alerte », Le Républicain Nord-Essonne, 13 février 2013, p. 9. 2014-02-13 LR Nuisances ae?riennes (pdf) 2014-02-13 LR Nuisances ae?riennes PGS (pdf)
7. FCNA, ENE…, « Plan de développement d’Orly. Les associations demandent un débat public », communiqué de presse du 7 novembre 2013.
2013-11-7 Communiqué de presse sur le de?veloppement d’Orly (pdf)
8. La Charte de l’environnement a été intégrée dans le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, et promulguée le 1er mars 2005.
Charte de l environnement (pdf)
DOCUMENT
« Déplafonnement d’Orly, et si une porte s’ouvrait ? » Fabrice Gliszczynski | 27/01/2014, 7:00 – 513 mots – Latribune.fr
« Le président de l’Acnusa, autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, estime que si les acteurs du transport aérien peuvent s’engager sur une diminution du bruit, une augmentation du trafic est possible. Une première dans le dialogue de sourds qui oppose partisans et opposants au déplafonnement d’Orly depuis 20 ans.
Vingt ans de tensions et d’incompréhension mutuelle. Vingt ans que le débat sur le déplafonnement d’Orly tourne au dialogue de sourds entre (schématiquement) les riverains et élus des communes proches de l’aéroport du sud parisien d’un côté, et de nombreux acteurs du transport aérien et agents économiques de l’autre Pour les premiers, pas question de remettre en question le plafond de 250.000 mouvements (atterrissages, décollages) annuels mis en vigueur en 1994, pour ne pas accroître les nuisances sonores. Pour les seconds, le niveau de bruit ayant baissé depuis 1994 en raison de la modernisation des flottes d’avions, le plafond pourrait être relevé voire supprimé pour permettre de profiter du potentiel de croissance d’Orly, lequel peut absorber au moins 450.000 mouvements annuels. Pour donner du poids à leur argumentation, ils rappellent les effets bénéfiques d’une hausse du trafic sur l’emploi pour les communes avoisinantes de l’aéroport.
Pas de remise en cause du statu quo
Un dossier sensible condamné au statu quo. « Aucun ministre ne remettra en cause le plafonnement d’Orly, c’est trop casse gueule », expliquait récemment un acteur du secteur. Le Frédéric Cuvillier, le ministre actuel des transports, ne veut d’ailleurs y toucher.
« Le ministre ne veut pas toucher au statu quo », a rappelé avec fermeté un membre de son ministère la semaine dernière, lors de l’assemblée générale du Board Airlines representatives (BAR), l’association de compagnies étrangères en France (Air France en fait aussi partie), où, de manière complètement improvisée, le jeu des questions-réponses a fait dévier le débat sur la question du plafonnement d’Orly.
L’Acnusa, un acteur clé
Généralement, le débat sur ce sujet complexe tourne court. Mais pour une fois quelqu’un l’a abordé sans tabou en essayant d’avoir une vision globale. Il s’agit de Victor Haïm, un ancien magistrat, aujourd’hui président de l’Acnusa, l’autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires. Un acteur clé, légitime aux yeux des associations de riverains.
« Si on peut s’engager auprès des riverains sur une diminution du bruit, on peut avoir une augmentation du trafic », a-t-il déclaré, rappelant que le trafic pourrait doubler d’ici à 2030.
« Contreparties »
Bigre ! Jamais ses prédécesseurs n’avaient tenu un tel discours. Interrogé en aparté, Victor Haïm a plaidé « pour une solution où les riverains et les collectivités locales sont gagnants ». Qu’ils aient des contreparties. Pour garantir moins de bruits, il a évoqué la définition d’un seuil de baisse de bruit et la sortie des avions les plus bruyants. Des mesures qui doivent s’accompagner d’autres contreparties pour les riverains et les communes pour que celles-ci n’aient pas que des inconvénients mais aussi des bénéfices. L’intérêt des riverains est au centre des préoccupations de Victor Haïm.
« Si le trafic double d’ici à 2030, je crains que les politiques fassent un jour sauter le verrou d’Orly au détriment des riverains ».
Faut-il y voir « l’esquisse du début d’un commencement d’un éventuel » déplafonnement d’Orly ? Peut être. »
http://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/20140126trib000811945/deplafonnement-d-orly-et-si-une-porte-s-ouvrait.html
© Jean-Marie CORBIN, Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, 9 février 2014.