Cette question est d’actualité en ce mois d’avril 2015 où la Maison des jeunes et de la culture (MJC) de Savigny-sur-Orge vit des jours difficiles suite à la décision d’Éric MEHLHORN (UMP), maire, et de sa majorité de supprimer sans préavis sa subvention 2015, la condamnant purement et simplement à disparaître d’une façon immédiate.
1. Un soutien constant de la municipalité à la MJC, même s’il fut parfois « alternatif»
Dans les années 1971-1980, la MJC a déjà vécu des heures sombres. On observera toutefois que la municipalité lui a accordé annuellement une subvention de façon continue jusqu’à ce printemps 2015, un soutien parfois ponctué de remises en cause passagères mais réversibles.
2. La MJC, un équipement de luxe ?
Portes de l’Essonne Environnement (PEE), qui a pour objet de défendre le patrimoine matériel et immatériel, a retrouvé un entretien entre deux membres de la commission municipale d’information de 1977 (MM. MARTIN et PONSERRE, élus sous la mandature de Raymond BROSSEAU, sénateur-maire et conseiller général), le responsable du service municipal d’information (M. PEREZ) et trois membres de la MJC (MM. CADRECHA, vice-président, MORIGNY et PLATZER). Il a été publié dans Savigny. Bulletin municipal officiel, informations locales. (5) Cette question cruciale était déjà posée : la MJC de Savigny-sur-Orge « serait-elle un équipement de luxe ? »
PEE propose de relire l’article complet, riche d’enseignement sur ce que représente une MJC et sur les débats qu’elle suscite. On connaît son point faible : son financement dépend en quasi totalité d’une subvention municipale. Déjà en 1977, cette situation était regrettée par le vice-président de la MJC de l’époque. Doit-on pour autant condamner ce lieu de culture ? Nos anciens élus ont répondu par la négative puisque, 38 ans après la publication de cet article, la MJC François Rabelais incarne toujours un formidable « lieu de rencontre et d’échange ».
Quelques phrases fortes extraites :
- L’ « apologie des restrictions et du rationnement conduit à rejeter tout équipement (…) » (Marc MARTIN, élu)
- « Si le bénévolat est indispensable comme école de formation à la responsabilité, il est absolument insuffisant pour assurer l’activité d’une importante association comme la MJC. » (Jean-Pierre MORIGNY, administrateur de la MJC)
- « Par essence, une MJC ne peut être un équipement de luxe : la culture ne peut être considérée comme un superflu, un luxe réservé à une élite. C’est au contraire un équipement d’une réelle utilité fonctionnant sans but lucratif. » (Jean-Pierre MORIGNY)
- Une MJC est « un lieu de rencontre et d’échange. Elle contribue également au développement de la vie associative dans un cadre démocratique, en initiant ses adhérents à la pratique des responsabilités, en leur donnant la possibilité de gérer leur équipement et leur animation. » (Jean-Pierre MORIGNY)
- « (…) le mode même de fonctionnement des MJC (…) amène les usagers à être non plus des consommateurs passifs de culture, mais les utilisateurs actifs de divers moyens d’expression. » (Michel PONSERRE, élu)
- « La fonction socio-culturelle des MJC est émancipatrice. Elle permet à tous d’exercer des responsabilités de développer sa personnalité. Lieu de débats d’idées où le critère de rentabilité directe ne vient pas de premier chef, la MJC dérange comme toute association qui élargit le champ des connaissances et celui d’intervention des citoyens, par delà les diversités d’idées. » (P. PEREZ, responsable du service municipal d’information – SMI)
- « Les MJC auraient un rôle de choix dans une France où la culture et la démocratie progresseraient de pair… » (Marc MARTIN) (6)
3. Non à la ville dortoir : la MJC, un investissement pour une commune vivante
Publié en décembre 1971, l’article de René CHÉRON, futur président de la MJC entre 1974 et 1986, intitulé « Brèves réflexions sur les loisirs et la culture » est aussi d’une actualité surprenante. Tout particulièrement les paragraphes conclusifs, panégyriques d’une MJC symbole d’une commune vivante. Extraits :
« J’ai lu avec intérêt, dans le bulletin municipal de juin-juillet que l’action culturelle, c’est aider à se constituer tout un réseau vivant d’associations, de groupements qui permettent à tout citoyen de réaliser ses potentialités dans un domaine qu’il a librement choisi.
Il est en effet nécessaire et grand temps que cette aide arrive. C’est un devoir pour la commune, par l’intermédiaire de ses représentants, de favoriser l’animation culturelle. Les jeunes et les moins jeunes aussi, ont besoin d’autres choses que la rue, les cafés, les flippers et les juke-boxes pour se distraire, se rencontrer et s’épanouir.
Il s’agit en définitive d’un investissement qui ne procurera pas de revenus financiers mais au bout duquel la commune toute entière trouvera son compte et deviendra une réalité vivante. » (6) (7)
« Les Saviniens sont la MJC de Savigny-sur-Orge. »
« La MJC est Savigny-sur-Orge »
Sources
1. Grain d’Orge. Courrier chrétien d’information de Savigny-sur-Orge, n° 36, novembre 1972, 12 p. Archives privées AM.
2. Grain d’Orge. Courrier chrétien d’information de Savigny-sur-Orge, n° 44, février 1974, 8 p. Archives privées AM (pdf : MJC GO FEVRIER 1974).
3. Savigny. Bulletin municipal officiel, n° 14, novembre 1975, 12 p. Archives privées AM.
4. Grain d’Orge. Courrier chrétien d’information de Savigny-sur-Orge, n° 63, mai 1977, 12 p. Archives privées AM (pdf : MJC GO MAI 1977).
5. Savigny. Bulletin municipal officiel, informations locales, n° 2, mai 1977, p. 12. Archives privées AM (pdf : MJC SSO BM MAI 1977).
6. Les passages surlignés en caractères gras relèvent de l’appréciation de l’auteur du présent article.
7. Grain d’Orge. Courrier chrétien d’information de Savigny-sur-Orge, n° 31, décembre 1971, 12 p. Archives privées AM (pdf : MJC GO DECEMBRE 1971).
© Philippe TRENTY, 25 avril 2015.