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L’enfer de la promiscuité des transports en commun (métro, transilien, ligne du RER-C…)

La revue numérique metropolitique.eu a publié deux articles forts intéressants sur la promiscuité dans les transports en commun : « L’enfer, dans la métro parisien, c’est les autres », de Martin KONING et Luke HAYWOOD (2 octobre 2014, 1) faisant suite à « Comment supporte-t-on les rames bondées ? Le rôle des émotions dans le métro parisien » , de Martin ARANGUREN et Stéphane TONNELAT (14 octobre 2013, 2).

L’INCONFORT, UNE NOTION POLITIQUE

L’introduction de KONING et HAYWOOD est pertinente. On génère de l’inconfort routier qui se reporte ensuite en inconfort des transports en commun. Le cas de Paris étudié depuis 2001 est éloquent. En une dizaine d’années, la municipalité parisienne a tenté de résoudre les problèmes de congestion routière en provoquant davantage de congestion routière pour inciter les usagers à se reporter vers les transport en commun. Mais, les transports en commun n’ayant pas ou peu augmenté leur capacité, ces derniers se sont retrouvés encore plus congestionnés.

C’est sur cette même base que le chantier du tramway T7 a été lancé ! Surcongestionner l’ex-N7 pour inciter un report vers le tramway. Encore faut-il pour être attractif avoir un minimum de performances. Deux critères fonctionnels se dégagent : rapidité et confort. Le T7 a une faible fréquentation entre Portes de l’Essonne et le MIN de Rungis. Il est confortable car des places assises restent disponibles, mais il est excessivement lent. Le phénomène s’inverse sur la section qui relie le MIN à Villejuif-Louis-Aragon. À peine inauguré, le T7 devient inconfortable à cause de sa sur-fréquentation. Comme tout transport de surface, sa rapidité reste plafonnée par les  intersections routières à franchir à allure réduite.

QUELLES CONCESSIONS POUR PLUS DE CONFORT ?

KONING et HAYWOOD traitent du seuil d’acceptabilité du métro parisien congestionné. Deux interrogations en ressortent :

  • Pour votre confort, êtes-vous prêt à allonger votre temps parcours ? Cet allongement se traduit, soit par un changement d’itinéraire, soit par un laisser passer une rame. Remarquons que la seconde attitude relève de la totale naïveté. Aux heures de pointe toutes les rames qui se succèdent sont bondées.
  • Êtes-vous prêt à payer plus cher pour votre confort ? C’est, d’une manière sous-jacente, prôner le rétablissement des premières classes ! Cette conception archaïque et discriminatoire des voyageurs se soldait par des compartiments moins occupés au détriment des autres. Notons que le projet CDG Express repose sur la base d’une tarification fortement différenciée en fonction du confort et de la rapidité visée.

Ce genre de propos seraient inacceptables si le STIF en venait à les reprendre à son compte.

  • Les transports en commun sont déjà très lents. Les voyageurs les empruntent majoritairement à des fins utilitaires. Quel plaisir y prendrait-on à y flâner ?
  • En réalité, pendant des décennies, les premières classes ne furent majoritairement réservées qu’aux fraudeurs et aux castes privilégiées des personnels travaillant dans les transports – largement pratiqué notamment à la SNCF. En septembre 1999, lors de l’abandon des premières classes dans les RER et les trains de banlieue SNCF, le STIF avoua piteusement que sa billetterie des tickets de première classe était plus de 20 fois inférieure à celle des tickets de seconde.

UN SEUIL D’ACCEPTABILITÉ DIFFÉRENT

Dessins représentant différents niveaux d’occupation d’un compartiment de métro. Les personnes interrogées doivent indiquer à partir de quel seuil cela devient pénible pour eux. © KONING et HAYWOOD.

À la lecture de l’étude KONING-HAYWOOD, on s’aperçoit que les voyageurs et les opérateurs de transport ne partagent pas le même niveau du seuil d’acceptabilité. Pour le commun des usagers, voyager debout plusieurs dizaines de minutes – comme c’est désormais le cas du RER-C – est inacceptable. À la RATP, les calculs en passagers debout sont établis sur une base de 4 voyageurs au m² (carte n°6), soit un carré de 100 x 100 cm. À titre de comparaison, une cabine de douche médiane mesure 80 x 80 cm, une cabine téléphonique 90 x 90 cm. Pour les cabines, seuls quelques excentriques s’amusent à s’y tasser en si grand nombre.  Les opérateurs de transport prendraient-ils les usagers pour des excentriques ?

Photograph by Joe Munroe in LIFE Magazine, 1959, Saint Mary's College of California. 22 students vie for world record in phone booth occupancy. Photo: Joe Munroe

Joe MUNRO a photographié, pour Life Magazine, en 1959, 22 étudiants du Saint Mary’s College of California entassés dans une cabine téléphonique. © Joe MUNROE.

LES ÉMOTIONS CALMENT-ELLES RÉELLEMENT LE JEU ?

Le second article analyse les réactions entre les voyageurs dans les flux de montée et de descente aux stations en période de pointe. Autant dire que les enquêteurs n’ont pas manqué de « matière » pour mener leurs observations. ARANGUREN et TONNELET ont déterminé que les émotions sont des modes de gestion de situations problématiques. Ainsi, les « petites émotions … contribuent à l’ordre social du métro. » Elles permettent la retenue des usagers qui « au lieu de se taper dessus, restent stoïques, été comme hiver, sur les quais et dans les rames du métro ». Cependant, ils ne peuvent s’empêcher de conclure par la véritable question : ces petites émotions sont-elles encore efficaces lors d’une perturbation continue des transports en commun. « Jusqu’à quel point fonctionnent-elles ? »  Les usagers de la ligne du RER-C sont ainsi actuellement excédés par les retards et les incidents répétés, les suppressions de train, les ralentissements, les travaux au coup par coup, les agressions, bref l’obsolescence de la ligne qui ne retrouvera sa « fiabilité » que dans plusieurs années si l’on en croit les dirigeants de la SNCF et du STIF !

En définitive, la forte promiscuité subie et la lenteur des transports en commun continuent fortement à dissuader les usagers de l’automobile à renoncer à leur véhicules individuels qui dégradent l’environnement urbain. Pire, involontairement, elles incitent les usagers actuels des transports en commun las d’un réseau obsolète et saturé à prendre – ou reprendre – leurs véhicules !

La pénibilité des transports en commun doit être bien davantage prise en compte dans les contrats qui lient opérateurs de transport en commun et le maître d’ouvrage, c’est-à-dire le STIF. Les critères actuels sont encore trop permissifs.

Extrait des Dingodossiers, tome 3. © Goscinny et Gotlib.

DOCUMENTS :
1. Martin KONING & Luke HAYWOOD, « L’enfer, dans le métro parisien, c’est les autres », Métropolitiques, 1er octobre 2014. URL : http://www.metropolitiques.eu/L-enfer-dans-le-metroparisien-c.html. Article en pdf : Metropolitique-Lenfer-dans-le-metro-parisien-cest-les-autres-2014-10-01.
2. Martin ARANGUREN & Stéphane TONNELAT, « Comment supporte-t-on les rames bondées ? Le rôle des émotions dans le métro parisien », Métropolitiques, 14 octobre 2013. URL : http://www.metropolitiques.eu/Comment-supporte-t-on-les-rames.html. Article en pdf : metropolitique – comment supporte-t-on les rames bondees 2013-10-10.

© Jean-Marie CORBIN, 5  octobre 2014.

 

Autoroute ferroviaire Atlantique (AFA), rapports et avis de la commission d’enquête

Le 9 septembre 2014, la préfecture du Pas-de-Calais, centralisatrice des éléments relatifs aux enquêtes publiques sur le projet d’AFA, a mis en ligne les rapports, avis et conclusions de la commission présidée par Jean-Pierre CHAULET. (1) Extraits et analyse de PEE. 

Sommaire de l’article
1. Une enquête sur l’intérêt général de l’opération (extraits des rapports)
2. Douze thèmes examinés (extrait des rapports)
3. Conclusion de la deuxième enquête sur la déclaration de projet (extrait du rapport)
4. Première analyse de PEE
Sources
Documents

1. UNE ENQUÊTE SUR L’INTÉRÊT GÉNÉRAL DE L’OPÉRATION

L’enquête préalable à la déclaration de projet devait « vérifier, en recueillant les observations du public, si les travaux envisagés sur le réseau ferré de France présentent un caractère d’intérêt général. Si la procédure est menée à son terme, cette enquête devrait aboutir à une déclaration de projet prise par le président de Réseau Ferré de France en tant que président d’établissement public…
L’enquête ne prévoyant pas d’expropriation il n’y a pas lieu de recourir à la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique. La commission d’enquête »
  s’est prononcée « uniquement sur l’intérêt général de l’opération.

Le critère de l’intérêt général d’une opération sur lequel la commission d’enquête doit se prononcer est essentiellement déterminé par les autorités administratives, ce qui signifie qu’il est à la fois subjectif et variable dans le temps et qu’il convient alors de s’assurer de la présence de ce critère pour savoir si une activité donnée est conduite dans l’intérêt général. C’est donc un critère tenant plus au but de l’activité poursuivie qu’à son objet.
Pour juger qu’une activité vise un but d’intérêt général, il faut s’appuyer sur certaines considérations théoriques. Ainsi, l’intérêt général se distingue de l’intérêt individuel ou même de la somme de ces intérêts individuels. C’est une notion qui dépasse ces intérêts et qui s’impose à eux, au nom du bien commun.
Dans ce cadre, la jurisprudence a étendu progressivement sa conception de l’intérêt général, en reconnaissant de manière toujours plus large la présence d’un intérêt général (théâtre, activités culturelles, sportives, de loisirs ou de tourisme).
Donc en l’absence d’expropriation (qui amènerait la commission d’enquête à se prononcer sur l’utilité publique de l’opération) et donc aussi en l’absence d’atteinte au droit de propriété, le bilan que dressera la commission d’enquête l’amènera à confronter l’intérêt général avec les atteintes environnementales, l’atteinte aux intérêts privés, l’atteinte aux autres intérêts publics et le coût financier du projet. » (2)

2. DOUZE THÈMES EXAMINÉS (1ère et 2e enquêtes)

La commission d’enquête a identifié douze thèmes principaux « correspondant à l’essentiel des préoccupations exprimées par le public dans les observations déposées sur les registres d’enquête, les courriers envoyés au président de la commission d’enquête et les courriels enregistrés sur le registre électronique mis en ligne sur le site internet de la préfecture du Pas-de-Calais, autorité organisatrice de l’enquête. » (3)

1. Les nuisances sonores et vibratoires, la pollution et les effets sur la santé,
2. Les transport des matières dangereuses,
3. Les dépréciations immobilières,
4. les itinéraires empruntés par la future autoroute ferroviaire (le tracé, variantes et suggestions),
5. La concertation et la qualité des dossiers,
6. La rentabilité et l’économie générale de l’autoroute ferroviaire Atlantique,
7. La sécurité et le ralentissement en terme de sécurité routière,
8. La création ultérieure éventuelle de plateformes intermédiaires en région parisienne,
9. Le mode de traction (électrique ou diésel ?),
10. Le système de transport choisi,
11. Le mauvais état du réseau notamment en région parisienne et l’entretien des ouvrages,
12. L’impact environnemental du projet notamment sur la faune et la flore.

RAPPORT AVIS CE AFA page garde

Rapport, avis et conclusions de la commission d’enquête sur l’AFA présidée par Jean-Pierre CHAULET (2e enquête), remis le 3 septembre 2014 au préfet du Pas-de-Calais. Page de garde.

3. CONCLUSION DE LA DEUXIÈME ENQUÊTE SUR LA DÉCLARATION DE PROJET

« Sur le fond de cette enquête relative aux travaux prévus sur le réseau ferré de France.

Après avoir examiné l’ensemble des critères relatifs à cette déclaration de projet, la commission d’enquête considère que cette seconde enquête ne remet pas en cause les conclusions dégagées lors de la première enquête, et :

Estime que ce projet :
– tient compte des principales critiques apportées en matière de transport de matières dangereuses en interdisant le transport des matières les plus sensibles, en limitant le tonnage de celles qui seront transportées tout en en assurant le contrôle durant tout le transport ;
– contribuera, mais de manière limitée à la dépréciation des biens, due essentiellement au fret ferroviaire actuel ;
– n’a d’autre choix que l’itinéraire proposé, notamment en région parisienne, compte tenu du réseau existant et de l’héritage historique ;
– permettra, par le choix du système MODALHOR, de satisfaire les besoins des transporteurs modestes en matière de ferroutage ;
– aura sur la faune et la flore un impact très limité pendant la phase de travaux sur le réseau ferré de France et négligeable en phase d’exploitation.

Regrette que ce projet :
– n’ait pas été précédé d’une large concertation associant notamment l’ensemble des maires et des acteurs économiques concernés ;
– ait été présenté à l’enquête publique sous forme d’un dossier très volumineux, touffu et confus n’ayant pas permis aux commissaires enquêteurs de renseigner plus précisément le public présent à leurs permanences ;
– ait abordé le problème des plateformes intermédiaires jetant la confusion dans l’esprit du public alors que ce n’était pas l’objet de l’enquête ;

Recommande :
– de prendre en compte l’existence possible de « hubs » ferroviaires sur le trajet de cette AFA, entrainant une concentration de passages se traduisant par une fermeture très fréquente voire parfois continue du passage à niveau concerné à certains moments de la journée et de minimiser, autant que faire se peut ces « hubs » pour éviter que de tels phénomènes ne se produisent ;
– dans l’attente d’une libération de l’itinéraire passant par Angoulême, lorsque la construction de la ligne LGV-SEA sera terminée, d’accélérer le développement du mode de traction bi mode électrique-diesel pour y recourir au plus vite.

Mais surtout la commission d’enquête considère qu’il est essentiel de corriger tous les points noirs, notamment sonores, apparus sur l’ensemble du parcours, et particulièrement en zone urbaine dense, au fur et à mesure du développement du fret.

EN CONCLUSION la commission d’enquête à l’unanimité de ses membres considère que l’opération envisagée est d’intérêt général et donne un AVIS FAVORABLE à la déclaration de projet nécessaire à la réalisation des travaux sur le réseau ferré national sous les Trois RESERVES suivantes:
(Si l’une des réserves n’est pas levée par les maîtres d’ouvrage le rapport est réputé défavorable).
RESERVE 1 :
RFF devra s’engager à désigner un interlocuteur unique par région chargé de faciliter la communication et les relations entre les propriétaires, les élus et les associations ;
RESERVE 2 :
RFF devra s’engager à procéder à la pose de systèmes antivibratoires, au cas par cas, sur les portions de voies identifiées comme génératrices de dommages majeurs sur les immeubles et ouvrages ;
RESERVE 3 :
S’agissant des nuisances sonores, RFF devra s’engager :
– à identifier lors d’études ultérieures conduites par un organisme indépendant du maître d’ouvrage tous les immeubles ou autres ouvrages susceptibles d’être impactés ;
– à réaliser selon les prescriptions de cet organisme des modélisations plus approfondies avant de finaliser les choix techniques et le dimensionnement des protections phoniques à effectuer ;
– à les traiter spécifiquement, selon un échéancier ne pouvant dépasser la mise en service des quatre ARQ(NDLR : ARQ signifie allers-retours quotidiens) en trains de 1050 m (Octobre 2021). » (4)

4. PREMIÈRE ANALYSE DE PEE

Tous les points abordés dans l’avis conjoint émis par les associations environnementales essonniennes (ENE, CAD, PEE) et francilienne (IDFE) ont été repris par la commission d’enquête. (5) Elle est d’une façon générale d’accord avec les arguments avancés. Toutefois, elle a donné un avis favorable à ce projet d’intérêt général, assorti de trois réserves qui, si l’une d’elles venait à ne pas être levée, transformerait celui-ci en avis défavorable. Est-ce un bon ou un mauvais point pour les riverains de la future AFA ?

Première réserve : la nomination d’un interlocuteur unique par région pour la communication. Action facile pour les opérateurs ! Nommer, oui. Mais, ensuite, sur le terrain, comment les riverains pourront-ils le rencontrer, lui exposer leur crainte, être pris en considération ? Les communes mettront-elles à disposition des locaux, organiseront-elles des réunions ? Quelles seront les modalités d’expression, de dialogue, de débat, de compte rendu ? N’y aura-t-il pas deux vitesses de communication locale, l’une rapide chez les maires qui se sont immédiatement souciés de l’impact de l’AFA sur leur territoire et chez leurs administrés, l’autre lente – voire quasi nulle – chez les élus qui ne se sont pas exprimés sur le sujet ? Et tout cela dans un temps record puisque l’AFA est supposée être mise en service fin 2015 – début 2016.

Deuxième réserve : la pose de système antivibratoire, au cas par cas, sur des portions génératrices de dommages majeurs. La prise en considération d’une nuisance bien connue chez tous les riverains de la ligne du RER-C et de la Grande ceinture est minorée par la précaution oratoire « cas par cas » et « dommages majeurs ». Quel sera le seuil d’acceptabilité au-delà duquel le dommage sera jugé majeur ? Comment les inspecteurs peuvent-ils juger sur un territoire, par sondage global, par sondage particulier sur la ligne, chez les riverains en visitant chacune des propriétés, sur déclaration publique ? Oublie-t-on l’origine des tissus pavillonnaires de la région parisienne tel celui des maisons en meulières des XIXe et première moitié du XXe siècles construites, parfois par les propriétaires eux-mêmes, donc sans aucune norme antivibration ? Avec quelle publicité de l’inspection au sein des communes ou quel programme communal d’inspection ? Avec quelle réactivité chez les élus en matière de communication ? Les nuisances vibratoires seront-elles vraiment prises en compte sur la durée et, surtout seront-elles réévaluées annuellement ? Quel en sera le coût et le surcoût pour le projet ? Au regard du déroulement des enquêtes publiques, de la faible information et de la qualité médiocre des dossiers, il est à craindre que, seul, un très petit nombre de lieux sera doté de système antivibratoire alors que c’est toute la région parisienne qui souffre depuis des décennies !

Troisième réserve : identification et modélisation des nuisances sonores par un organisme indépendant afin de placer des protections phoniques, suivant les recommandations dudit organisme, avant octobre 2021. Sous-entendu : aux endroits les plus exposés ? Auxquels cas cela est nettement insuffisant. Comme l’on pouvait s’y attendre, l’enquête a été un exutoire pour les riverains résidents en zone urbaine dense, excédés par l’intensification des nuisances sonores ces dernières années. Les mesures de protection annoncées régulièrement par les opérateurs dans leurs différents programmes de rénovation ou de modernisation sont invisibles. Elles ne semblent pas produire d’effet. Sont-elles seulement réelles pour le citoyen lambda ? Non, parce que la résorption est toujours limitée à des points dits « noirs » en oubliant que le seuil d’acceptabilité des nuisances sonores relève d’un vécu psychologique donc d’une question de santé publique. Le sujet doit être traité dans son ensemble, pas de façon séquencée et restrictive. Un train de fret d’un kilomètre de long, même équipé de la dernière génération de matériaux, sera toujours source de nuisances sonores pour les riverains se trouvant en immédiate limite de protection phonique et au-delà (ceux vivant dans les aires de résonances ou d’échos). Où sera positionné le curseur de l’égalité de tous les citoyens devant le traitement des nuisances à la source et en façade ?

En résumé, la commission d’enquête réaffirme régulièrement son souhait de voir RFF investir dans la réduction des nuisances sonores et vibratoires dans les zones densément peuplées, comme la région parisienne, « pour une meilleure acceptabilité sociale » du projet par les « populations concernées ». (6) Mais, la subordination de l’avis à trois réserves trop généralistes, peu contraignantes, concernant des nuisances « historiques », pouvant être aisément levées par les opérateurs dans des proportions minimes, est bien trop faible pour bloquer le projet d’AFA soumis.

Association environnementale, PEE milite en faveur du ferroutage. C’est une nécessité absolue afin de réduire le trafic des poids lourds et leurs impacts négatifs sur la santé, mais pas dans ces conditions pour une région aussi densément peuplée que l’Ile-de-France, souffrant à l’excès de nuisances et d’un réseau de transports ferrés saturé et défaillant. Les associations ont eu l’occasion de le rappeler en évoquant la possibilité d’un contournement faisant l’objet d’une  véritable concertation dans un récent article paru dans le média numérique Essonneinfo.fr. (7) La commission d’enquête le reconnaît elle-même : les « alternatives de contournement » de la région sont « quasi-inexistantes » en l’état du réseau ferré français, cependant « le seuil de saturation » sur les itinéraires choisis « sera très rapidement atteint condamnant à terme tout développement ultérieur » de l’AFA ! (8) Projeter une autoroute ferroviaire sans avenir, est-ce bien raisonnable par les temps actuels de crise économique ? Il apparaît donc urgent de demander à l’État de contraindre la SNCF et RFF à contourner la région parisienne en créant une ligne dédiée au fret, comme c’est le cas dans d’autres pays européens.

SOURCES
1. Les avis de la commission visant les deux enquêtes ont été remis au préfet du Pas-de-Calais le 3 septembre 2014. Le dossier complet sur l’AFA est consultable sur le site internet de la préfecture du Pas-de-Calais : www.pas-de-calais.gouv.fr.
2. Rapport, avis et conclusions de la commission d’enquête, 2e enquête, p. 117.
3. Rapport, avis et conclusions de la commission d’enquête, 2e enquête, p. 117.
4. Rapport, avis et conclusions de la commission d’enquête, 2e enquête, pp. 127-129.
5. Avis conjoint défavorable des associations Portes de l’Essonne Environnement (PEE), Culture Arts Découverte (CAD) et des fédérations Essonne Nature Environnement (ENE), Ile-de-France Environnement (IDFE) : http://portes-essonne-environnement.fr/autoroute-ferroviaire-atlantique-2e-enquete-avis-defavorable-de-pee/.
6. Rapport, avis et conclusions de la commission d’enquête, 2e enquête, p. 94.
7. Jérôme LEMONNIER, « L’autoroute ferroviaire Atlantique toujours autant malmenée », Essonneinfo.fr, 9 septembre 2014 (pdf) : Essonne : L’Autoroute ferroviaire Atlantique toujours autant malmenée – 9 septembre 2014.
8. Rapport, avis et conclusions de la commission d’enquête, 2e enquête, p. 122.

DOCUMENTS
Première enquête publique : rapport, avis et conclusion de la commission d’enquête (pdf) : 5. AFA CE 1e enquete Rapport – Parties 1 et 26. AFA CE 1e enquete Rapport – Partie 37. AFA CE 1e enquete Rapport – Partie 4 – Avis et conclusions9. AFA CE 1e enquete Complément 1 – 302 courriels10. AFA CE 1e enquete Complément 2 – 57 courriers11. AFA CE 1e enquete Complément 3.
Deuxième enquête publique : rapport, avis et conclusion de la commission d’enquête (pdf) : 1. AFA CE 2e enquete Rapport2. AFA CE 2e enquete Annexe3. AFA CE 2e enquete Complément 1 – 176 courriels4. AFA CE 2e enquete Complement 2 – 20 courriers.

© Philippe TRENTY, 24 septembre 2014.

Les tapages nocturnes cautionnés par Éric Mehlhorn, maire de Savigny-sur-Orge ?

Alors que la décision du 4 avril 1968 portant réglementation de l’utilisation nocturne de l’aéroport d’Orly proscrit tout vol de nuit entre 23 h 30 et 6 h 00, les Saviniens sont régulièrement privés d’une heure de sommeil supplémentaire « accordée » par Aéroport de Paris (ADP). (1) En effet, les éboueurs commencent leur collecte avec fracas dès 5 h 00 du matin : de plus en plus de Saviniens se plaignent de ce tapage nocturne organisé. Camions aux décibels pétaradants à fond les manettes, bacs et containers jetés bruyamment sur les trottoirs, personnels qui courent en sifflant ou en vociférant pour accomplir leur métier. Quelle hâte, quel engouement à nous débarrasser de nos immondices !

UNE CONVENTION COLLECTIVE SINGULIÈRE

L’explication est en fait toute simple, la convention collective de cette branche professionnelle est bien singulière sur plusieurs points. Elle permet à ces personnels d’être payés à la mission et non pas à l’heure comme c’est le cas dans la plupart des autres professions. Ainsi, plus vite le travail est commencé, plus vite il est terminé ! Le petit matin, où la circulation automobile est moindre, est une aubaine pour ces éboueurs pressés d’enchaîner un probable second emploi comme certains le disent. Qu’importe le repos brisé de milliers de riverains …

éboueur selon Gotlib

Le boueux de mon enfance. Rubrique à brac, tome 2, Éditions Dargaud. © Marcel Gotlib.

LA CAUTION D’ÉRIC MEHLHORN, MAIRE DE SAVIGNY-SUR-ORGE

Alerté sur ces dérives, la réponse de la mairie de Savigny-sur-Orge en date du 5 juin 2014 est stupéfiante, voire navrante : « Pour faire suite à votre courrier concernant les horaires de passage pour la collecte des ordures ménagères, je vous informe que des circuits ont été établis en accord avec l’entreprise, que les horaires peuvent varier mais que la collecte peut effectivement commence dès 5h du matin. » Tout va bien braves gens et mettez des boules quies ! On était en droit d’espérer d’un maire qu’il se préoccupe davantage de la tranquillité de ces administrés. Quant à la société Europe Service Déchets (ESD, sise à Viry-Châtillon), prestataire assurant la collecte de déchets pour la ville de Savigny-sur-Orge, elle n’a pas daigné répondre aux sollicitations par courriel. Attendons la réponse de la Communauté d’agglomération les Portes de l’Essonne (CALPE) qui exerce depuis 2013 la compétence collecte et traitement, encaissant ainsi la Taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) versée par les Saviniens, soit près de 3,8 millions €. La question citoyenne est simple : les habitants de Savigny-sur-Orge bénéficient-ils de la qualité d’un service de collecte et de traitement des déchets ménagers qui coûte plus de 3 millions d’euros par an ? (2)

réponse mairie savigny suite à passages à 5h des éboueurs 2014-06-17

Réponse de Nadège Atchergaele, maire-adjointe à Savigny-sur-Orge, le 05 juin 2014.

Il convient de s’interroger sur la nécessité du tapage nocturne, de fait organisé ou cautionné par un règlement municipal dans un tel cas. Pourquoi lutter contre le bruit et les nuisances d’un aéroport à proximité alors que, dans le même temps, le maire autorise la nuit une nuisance sonore répétée définie à l’article R. 623-2 du Code pénal ? Cette pratique est entièrement politique. Les horaires de collecte des déchets ménagers sont rarement remis en cause, notamment en raison des problèmes de circulation et de l’évolution des flux… La collecte des déchets ménagers relève d’une mission de service public. Elle n’est pas soumise à des prescriptions particulières relatives aux conditions d’horaires. (3) Les arrêtés « bruit » ne s’appliquent donc pas à ce type d’activité. (4) Cette thèse est discutable et abusive.

UNE MISSION DU MAIRE : ASSURER LA TRANQUILLITÉ PUBLIQUE

Le maire est tenu d’assurer dans sa commune la tranquillité publique ! Nadège ACHTERGAELE, maire adjointe ayant répondu au courrier adressé au maire, aurait pu proposer d’étudier avec toutes les associations environnementales de la commune et les riverains le report d’une heure du début de collecte afin de la faire correspondre au couvre-feu d’Orly. Elle aurait pu envisager la création d’une commission extra-municipale, formée de citoyens, de fonctionnaires, d’employés du concessionnaire ESD afin de travailler sur la notion du bruit incivique. L’Agence régionale de la santé est compétente pour aider le maire à faire respecter la réglementation. La première adjointe aurait pu indiquer qu’en tant que nouvelle élue, elle l’interrogerait sur les dispositifs techniques pouvant être mis en place sur les camions du concessionnaire ESD afin de faire disparaître les nuisances…

Évoquons enfin la responsabilité du maire pouvant être engagée pour carence dans l’exercice de son pouvoir de police administrative en ne prenant pas les mesures appropriées pour mettre fin à des nuisances sonores générées par ses services ou des concessionnaires.

EN QUÊTE D’UNE MUNICIPALITÉ SOUCIEUSE DE LA SANTÉ DE SES ADMINISTRÉS

Cette nonchalance vis-à-vis des nuisances sonores nocturnes, qui n’est pas sans rappeler l’absence de réaction du maire Éric MEHLHORN sur le projet de l’autoroute ferroviaire atlantique, conduit à s’interroger sur la capacité de certains élus à gérer des dossiers portant atteinte à la qualité de vie et à l’environnement. Faut-il s’inquiéter de leur potentiel de réactivité lorsque ADP cherchera à réduire à une peau de chagrin le couvre-feu afin de rentabiliser ses nouveaux aménagements ? En Ile-de-France, le bruit représente la première source de nuisance. Ses effets sur la santé sont néfastes. Les enjeux de réduction du bruit doivent être considérés par les autorités publiques comme étant cruciaux pour le bien-être de leurs administrés. La nouvelle municipalité de Savigny-sur-Orge devrait travailler à une meilleure conciliation entre les usages urbains avec les nuisances sonores sans pour autant les augmenter ! (5)

SOURCES ET DOCUMENTS
1. Décision ministérielle
sur le couvre-feu d’Orly (pdf) :  Decision_ministerielle_Orly_1968.
2. Voir l’article de Bernard MÉRIGOT, « Savigny-sur-Orge. Commission consultative des services publics locaux du 26 septembre 2013 : déchets ménagers, eau et assainissement », sur le site internet www.savigny-avenir.fr : http://www.savigny-avenir.fr/2013/09/26/savigny-sur-orge-commission-consultative-des-services-publics-locaux-du-26-septembre-2013-dechets-menagers-eau-et-assainissement/.
3. Arrêté municipal relatif aux bruits de voisinage Savigny-sur-Orge 2003-10-02.
4. Voir le site internet du Centre d’information et de documentation sur le bruit (CIDB) : www.bruit.fr.
5. Site internet de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) : www.ademe.fr.

© Jean-Marie CORBIN, 1er septembre 2014.

Autoroute ferroviaire Atlantique, 2e enquête : avis défavorable de PEE

Entre le 23 juin et le 23 juillet 2014, une deuxième enquête publique unique soumet aux citoyens le projet d’une autoroute ferroviaire Atlantique (AFA) entre Dourges (Pas-de-Calais) et Tarnos (Landes), via la région parisienne, soit 1 050 km. Par extension, l’Espagne sera reliée à la Belgique. Le but est de proposer une alternative au transport routier sur des axes français saturés dès le printemps 2016. L’offre s’adresse au trafic de transit, de longue distance, signifiant ainsi qu’il n’y a pas de cabotage entre les terminaux. La France est traversée du nord au sud-ouest et vice-versa. Un contrat de concession entre l’État et VIIA Atlantique, filiale de la SNCF, a été signé le 20 mars 2014. En faisant transporter l’équivalent de 60 semi-remorques par train (sur l’AFA seules les semi-remorques sont embarquées, pas les chauffeurs et les tracteurs), les convois atteindraient plus de 1 km de long en 2019, une première en France. En principe, quatre trains dans chaque sens assureraient une navette quotidienne, traversant l’Essonne via la ligne du RER-C. (1)

AFA. Ile-de-France. Infographie Le Parisien 5 mai 2014

Document : L’AFA en Ile-de-France. Infographie extraite de l’article de Sébastien THOMAS, « Des trains de camions d’1 km de long pourraient passer par le 91, Le Parisien Essonne matin, 5 mai 2014, p. II.

UN DEUXIÈME AVIS DÉFAVORABLE DE PEE SOUTENU PAR D’AUTRES ASSOCIATIONS

Le premier avis défavorable de PEE a été publié sur ce site, dans l’article intitulé « L’autoroute ferroviaire Atlantique passera-t-elle par la ligne du RER-C ? », le 29 mai 2014. (2)

Le deuxième avis de PEE a été coécrit et cosigné avec les fédérations Ile-de-France Environnement (IDFE) et Essonne Nature Environnement (ENE) ainsi que l’association Culture Arts Découvertes (CAD). Il a été adressé au président de la commission d’enquête en lettre recommandée avec accusé réception le 22 juillet 2014, enregistré en préfecture du Pas-de-Calais, siège de la commission, le 23 juillet. (3) Il a également été inséré dans le registre électronique consultable sur le site de ladite préfecture. (4) Onze points ont été développés :

1. Une AFA inscrite dans la loi Grenelle 1, mais une économie du projet incertaine
L’idée d’un transport de fret par voie ferrée plutôt que par la route n’est pas neuve, notamment en Europe. Elle présente des avantages environnementaux incontestables. C’est pourquoi le transport des semi-remorques routières sur rail a été impulsé par la loi Grenelle 1 d’août 2009 qui a inscrit au programme l’AFA, estimée alors à 190 millions d’euros. Les temps de transport peuvent être ainsi raccourcis. On avance une réduction des coûts de 10 à 15 % dans les documents du dossier d’enquête publique unique (DEPU). Les gains supposés ne seraient pas négligeables en diminuant de 10 à 20 % le trafic routier par transfert vers le fret ferroviaire, soit environ 85 000 poids lourds annoncés pour près de 100 000 tonnes équivalent CO2 économisés annuellement à terme et en régime de croisière.

Établies à partir des statistiques issues de l’utilisation des deux autoroutes ferroviaires existantes en France, les données socio-économiques chiffrées ne sont pas convaincantes.  Dans son rapport sur les autoroutes ferroviaires de février 2012, la Cour des Comptes a pointé du doigt ces expériences en utilisant une terminologie rude pour les qualifier : « inabouties », « marquées par des retards », « lancées sans étude suffisante » et « déficitaires ». En résumé, ces autoroutes « peinent à faire » leurs « preuves sur les plans économique et financier », « le modèle n’apparaît viable, dans l’avenir, qu’à des conditions exigeantes ». L’économie générale financière de l’AFA semble précaire. Le Commissariat général à l’investissement s’inquiète d’une forte dépendance aux subventions, des incertitudes sur la rentabilité, le financement et, surtout, la participation de l’Europe alors que ce projet profite davantage aux Européens qu’aux Français.

2. Un possible transfert de nuisances dans une Ile-de-France sur-densément peuplée
Des associations environnementales et certaines municipalités sont très réservées, notamment en Ile-de-France, région la plus densément peuplée traversée par l’AFA. Cette première zone urbaine de France concentre un nombre de nuisances maximales (nuisances sonores continues, pollution permanente de l’air, transports en commun déficients et défaillants, réseau routier saturé, risques sanitaires industriels et technologiques, etc). Les atteintes à la qualité de vie et les déséquilibres écologiques n’ont jamais été aussi importants. Alors que la densité d’habitants à l’hectare est la plus forte comparée aux grandes agglomérations européennes, le Schéma directeur régional d’Ile-de-France (SDRIF) pour 2030, adopté en octobre 2013, prévoit une densification des pôles gares de l’ensemble du réseau francilien. Rien ne laisse présager que le report modal route/rail proposé par l’AFA ne constitue pas un véritable transfert de nuisances pour les riverains franciliens des voies ferrées plus nombreux à l’avenir.

Il est illusoire de faire passer des convois de fret de plus d’un kilomètre de long sur le réseau ferré francilien déjà surchargé, voire saturé et à risque car vétuste. Ainsi, de 2016 à 2029, quatre trains (aller-retour) assureraient une navette quotidienne entre les terminaux en empruntant les lignes de la Grande ceinture et celle du RER-C dont les travaux de modernisation débutent à peine et sont échelonnés sur six années. En phase de test (2015), 10 à 20 allers-retours seront effectués. A terme, en pleine activité selon le programme qui diffère du projet, 20 à 40 trains pourraient rouler sur l’AFA. Avec l’incitation des pouvoirs publics au recours aux transports collectifs et la pression de la demande croissante des usagers, ne doit-on pas s’attendre avec l’AFA à une hyper-saturation d’un réseau de voyageurs franciliens, souvent régulé par la contrainte, les retards et les suppressions de trains ?

3. Des protections phoniques en Ile-de-France ?
Les convois de l’AFA rouleraient à environ 60 km/h avec un matériel peu bruyant. Le bruit généré en soi serait donc moins important que pour n’importe quel autre train de fret d’ancienne génération, mais il s’ajoutera aux autres bruits environnants d’autant plus perceptibles s’ils sont nocturnes… Ainsi, en Essonne, le surplus serait évalué entre 0,2 et 0,8 dB selon les secteurs. Ces mesures sont des moyennes théoriques. Elles ne prennent pas en compte le phénomène d’émergences sonores. Elles ne reflètent pas la réalité qui varie en fonction des conditions climatiques, des vents porteurs, du bruit des roues sur les rails, du sifflement des bruits aérodynamiques, des crissements des freins, des types de rails et de l’environnement des ouvrages d’art. Pour un riverain de l’AFA sis à un point fixe, le passage d’un train d’un kilomètre de long à 60 km/h génèrerait 1 minute de bruit à laquelle il faut ajouter le temps d’écho et de réverbération. Ce bruit s’additionne aux nuisances acoustiques autoroutières et aériennes critiques en Ile-de-France.

Préoccupation constante des Français, la pollution sonore est à l’origine de nombreux problèmes de santé, non pris en compte à leur juste mesure dans les projets publics. Par ailleurs, les impacts socio-économiques (perte d’attractivité du territoire, dévaluation des prix de l’immobilier, etc) des nuisances sonores augmentées ne doivent pas être négligées, surtout dans une Ile-de-France déjà en souffrance. Quel programme de protections phoniques le long des voies dans les milieux urbains denses VIIA/SNCF proposent-elles dans le cadre de l’AFA ? Les murs anti-bruit, on les connaît le long des autoroutes routières. Ils ne sont pas toujours efficaces. Aucune précision n’est apportée dans le DEPU pour l’Ile-de-France.

4. Des solutions pour les nuisances vibratoires en Ile-de-France ?
Tous les riverains des lignes de chemin de fer connaissent les effets négatifs des vibrations (gêne acoustique, dommages sur les bâtiments) liées au roulement des essieux de certaines rames mal équilibrées des trains de fret, aux conteneurs mal calés sur une structure ferroviaire défaillante. VIIA/SNCF appréhenderont-elles l’impact de ces nuisances vibratoires dans tous les secteurs urbains et les solutionneront-elles au même titre que les nuisances sonores ? Agiront-elles à la source partout où cela sera nécessaire ? Le DEPU ne mentionne rien pour l’Ile-de-France, seules les préconisations pour la province sont détaillées.

5. Des mesures dérisoires ou absentes pour l’Ile-de-France
En Ile-de-France, VIIA/SNCF/RFF n’apportent pas les solutions suffisantes pour protéger les Franciliens de toutes nuisances supplémentaires. Les mesures d’évitement inscrites dans le DEPU sont dérisoires ou inexistantes face à la densification des pôles gares prévue par le SDRIF 2030, aux dysfonctionnements constants dans la gestion des transports ferrés de voyageurs de banlieue et de fret actuels. Faire croire que les réductions des vibrations à la source et des nuisances sonores seront assurées sur l’ensemble des points noirs relèverait de l’utopie. L’lle-de-France est écartée de tout véritable programme. L’Autorité environnementale est muette sur la situation francilienne. L’économie générale du projet d’AFA ne prend pas suffisamment en compte ces aspects relevant de la santé publique. Or, ces atteintes supplémentaires à la qualité de vie de millions de Franciliens ne peuvent être oubliées.

6. Assurer le principe de précaution
En Seine-Saint-Denis, les conseils municipaux concernés par le tracé de l’AFA ont voté une motion contre le passage de cette autoroute en zone urbaine dense. Le principe de précaution est mis en avant dans ce refus de voir les communes franciliennes traversées par des trains potentiellement dangereux car transportant des produits inflammables, explosifs, toxiques, et radioactifs. Nous ne pouvons que confirmer cette inquiétude, sachant que les lignes ferroviaires de banlieues franciliennes sont déjà fréquemment empruntées par des convois de déchets nucléaires sans que les populations ne soient averties. Ainsi, en décembre 2013, après un déraillement d’un wagon de l’un de ces convois, le maire de Drancy a décidé de porter plainte contre l’État pour mise en danger de la vie d’autrui.

L’Autorité environnementale a estimé que les risques technologiques et les risques de pollution accidentelle des eaux du projet d’AFA constitueraient à l’échelle locale des enjeux environnementaux de première importance. De manière générale, les risques sont sous-estimés et les études excluent régulièrement les réactions combinées de matières toxiques en cas d’accident. La crainte sur le bruit, la dangerosité, les impacts sur l’homme et son environnement gagne du terrain parmi les élus et les associations locales.

7. Une absence de concertation en Ile-de-France
Les communes, les communautés de communes ou d’agglomération, les associations critiquent à juste titre l’absence de précision concernant la politique menée par la SNCF. Elles dénoncent leur très faible participation aux concertations et aux décisions parce que la SNCF ou l’État l’ont décidé ainsi. D’autant plus qu’en 2013, le débat public précédant toute enquête publique n’a pas eu lieu en Ile-de-France, mais seulement dans les deux départements où se trouveront les futurs terminaux Dourges et Tarnos ! Il faut remonter à 2006 pour trouver une trace d’un débat public sur les lignes à grande vitesse avec mention d’une autoroute ferroviaire sur la façade atlantique de la France.

Il est impossible d’apporter un blanc seing à ce projet d’AFA sans une réelle concertation avec tous les élus, les milieux associatifs et les citoyens sur l’ensemble du tracé au préalable. Elle aurait dû avoir lieu dans toutes les régions traversées, à plus forte raison en Ile-de-France, la zone la plus densément peuplée de cette ligne non dédiée mais empruntant le réseau ferré national existant. Elle est fortement réclamée.

8. Une plateforme de transbordement à Brétigny-sur-Orge (Essonne) sans réelle concertation
Par ailleurs, « à plus long terme, lorsque le service imposera des développements », le projet global prévoit une plateforme multimodale au sud de Paris, le secteur préférentiel étant situé entre Orléans et Paris selon la carte du programme d’autoroute ferroviaire Atlantique. Aucune véritable précision n’est indiquée dans le DEPU en dehors d’un « Brétigny-sur-Orge » apparaissant au détour d’une énumération de sites provinciaux au sujet du dossier remis au candidat concessionnaire de la délégation de service public. L’AFA mise en service début 2016 sera une ligne directe entre deux terminaux nord et sud. Aucun prévisionnel n’est indiqué sur la construction et la mise en service de la plateforme sud-parisienne pouvant offrir le service du report multimodal route/rail en Ile-de-France afin de désengorger certains axes routiers, ce qui reste à prouver.

Or, depuis 2008, des études de faisabilité pour l’implantation d’un terminal d’autoroute ferroviaire pouvant accueillir 1 à 2 trains de 40 wagons par jour à Brétigny – La Norville ont été réalisées par RFF. Le projet a été inscrit dans le contrat de plan Etat-Région et figure dans le SDRIF 2008. Des discussions ont eu lieu entre élus du secteur, RFF, le conseil général et la préfecture de l’Essonne. Des interrogations ont été posées sur l’engorgement de la route départementale 19, principal accès à cet éventuel terminal. L’association locale de protection de l’environnement (ADEMUB) avait insisté sur l’inexistence d’un réseau routier adapté et suffisant à Brétigny pour absorber convenablement le trafic routier supplémentaire attendu. De même, les échappatoires vers la nationale 20, la Francilienne (nationale 104) et les autoroutes A6-A10-A5 sont très délicates car saturées. Elles nécessitent un volet à part entière de toute étude de faisabilité.

Pourquoi tous ces éléments ne figurent-ils pas dans le DEPU de l’AFA, sachant que des publications récentes de la SNCF mentionnent le fait que Brétigny « accueillera bientôt la gare francilienne de la future autoroute ferroviaire qui reliera le nord de la France à la frontière espagnole » ? (5) Pourquoi ce manque de transparence ? En 2008, il n’y a eu aucune enquête publique parce les terrains de Brétigny appartiennent à RFF. Pourtant, la solution de Brétigny-sur-Orge, nœud ferroviaire et routier, nécessite une large concertation sur l’ensemble du territoire essonnien avec tous les acteurs (porteurs du projet, collectivités territoriales, associations, habitants).

9. Aucune voie d’évitement de plus d’1 km n’existe entre Pierrefitte et Étampes
Dernièrement, la chaleur estivale a fortement perturbé les transports en commun, avec pour conséquences des ralentissements, des retards et des annulations de trains de banlieue. Ainsi, la SNCF a précisé que si les rails chauffent à plus de 45 °C, les trains ne peuvent rouler à plus de 40 km/h pour des raisons de sécurité. Quid des convois de l’AFA ? Seront-ils mis en attente ? Mais où exactement entre Pierrefitte et Étampes ? Dans la configuration actuelle, un convoi engagé doit, quelle que soit la conjoncture, passer par l’Ile-de-France. Quid de l’impact sur le trafic voyageur de banlieue en cas d’un quelconque problème technique ou climatologique, chronique ou ponctuel ?

10. Des travaux nocturnes d’ajustement des infrastructures
En pleine cacophonie sur les quais qu’il faut raboter pour le passage des nouveaux TER commandés par la SNCF, il semblerait que, pour celui de l’AFA, il faille aussi réduire certains quais afin de faire circuler des trains larges de 2,55 m. Le DEPU n’indique pas précisément les lieux des 3 800 interventions où ces travaux nocturnes d’ajustement du gabarit bas seront nécessaires. Une lacune… Même remarque pour les infrastructures qui devront être adaptées en hauteur. Dans son avis rendu public le 19 décembre 2012, l’Autorité environnementale insiste sur les coûts élevés du projet, avec notamment un surcoût de retouche des ouvrages de 188 millions d’euros.

11. Un contournement de la région parisienne impératif
Depuis l’accident de Brétigny en juillet 2013, les rapports s’accumulent sur les preuves indiscutables du manque d’entretien du réseau ferré francilien par le binôme SNCF/RFF, ainsi que son obsolescence. RFF reconnaît d’ailleurs que la robustesse du réseau ne permet pas d’accueillir en l’état ces trains longs, de fort tonnage, que sont les convois d’autoroute ferroviaire. Une véritable réflexion doit être conduite sur la promotion du report modal route/rail hors des zones urbaines denses.

En leur temps, Lyon et Montpellier ont été contournées par l’autoroute ferroviaire Perpignan-Luxembourg. Pourquoi pas le bassin francilien ? Selon Jean-Christophe LAGARDE, député-maire de Drancy, le contournement de la région parisienne « apporterait une réponse pertinente sur les longs trajets à la fois pour les marchandises dangereuses et pour les remorques des transporteurs routiers. » En ce sens, au regard de la fiabilité du réseau ferré parisien, la mise en avant du principe de précaution inscrit dans la Charte de l’environnement pour la population concernée, soit plus d’un million de Franciliens, est essentielle. La proposition de contourner l’Ile-de-France est la meilleure solution afin d’éviter des catastrophes en chaîne et des dysfonctionnements supplémentaires pour les millions d’usagers franciliens.

CONCLUSION

L’association Portes de l’Essonne Environnement et les cosignataires considèrent qu’il est utile d’envisager la création d’une autoroute ferroviaire permettant de traverser la France du Nord au Sud afin de répondre à un meilleur respect de l’environnement dans la cadre de la loi Grenelle 1 d’août 2009, à une meilleure qualité de vie et à une amélioration de la santé des habitants de villes actuellement polluées par le trafic incessant des poids lourds.

L’association Portes de l’Essonne Environnement et les cosignataires considèrent cependant qu’il est irraisonnable d’ajouter un nouveau trafic traversant la région Ile-de-France en utilisant la ligne C du RER et la Grande ceinture, saturées. L’accident de Brétigny-sur-Orge en juillet 2013 figure dans toutes les mémoires des usagers et des riverains : il rappelle la vétusté et les carences d’entretien des infrastructures ferroviaires. Réclamée depuis plus de 20 ans par les associations de défense des usagers de la ligne du RER-C, la modernisation du réseau ferré sud-francilien commence à peine. Les incidents à répétition qui émaillent le trafic journalier ne seront pas pour autant en voie d’extinction avec le mode de gestion des lignes franciliennes choisi par les opérateurs.

L’association Portes de l’Essonne Environnement et les cosignataires considèrent que le projet de la Métropole du Grand Paris et le SDRIF 2030 inquiètent les Franciliens sur la capacité à assurer un nombre de déplacement toujours plus élevé dans la région qui bat tous les records de densité de population en Europe. Il suffit de comparer la situation de Londres (avec 4 300 hab/km2), Berlin (avec 3 900 hab/km2) et Paris élargi à ses trois départements limitrophes (avec 8 500 hab/km2) pour s’apercevoir que l’hyper-saturation est propice à des dysfonctionnements et des nuisances exponentielles. Il faut tirer toutes les conséquences en matière d’aménagement urbain qui découlent du dépassement de ce seuil, notamment en matière de transport de voyageurs et de fret.

Pour ces motifs, en l’absence du contournement de la région parisienne, l’association Portes de l’Essonne Environnement, Ile-de-France Environnement, Essonne Nature Environnement et Culture Arts Découverte émettent un avis défavorable au projet de création d’une autoroute ferroviaire Atlantique traversant une zone urbaine densément peuplée comme l’Ile-de-France.

Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, trésorière et responsable éditoriale
de Portes de l’Essonne Environnement
et
Catherine GIOBELLINA, vice-présidente d’Ile-de-France Environnement
Jean-Pierre MOULIN, président d’Essonne Nature Environnement
Bernard MÉRIGOT, président de Culture Arts Découverte



COMMENTAIRES

Le 24 juillet 2014, lors d’une conversation téléphonique avec le président de la commission d’enquête, des éclairages ont été apportés aux fédérations et associations signataires.

  •  L’enquête publique sur le projet d’AFA n’est pas une enquête d’utilité publique car elle porte sur trois projets sis sur des propriétés de la SNCF et de RFF. Cela explique qu’il n’y ait pas eu de concertation au préalable, notamment en région parisienne – ce n’est pas une obligation. La présente enquête est exceptionnelle, il n’y en pas eu précédemment pour les autoroutes ferroviaires Perpignan-Luxembourg (mise en service en 2007, 1 045 km) et Turin-Chambéry (mise en service en 2003, 175 km).
  • La ligne AFA sera effectivement directe, sans arrêt entre Dourges et Tarnos. La plateforme de Brétigny serait abandonnée. Les porteurs du projet d’AFA ont confondu « programme » et « projets ». Dans le premier, il y a une faisabilité possible à Brétigny. Dans le second, ce n’est plus le cas. S’il devait y en avoir une, une nouvelle enquête devrait être déclenchée.
  • RFF reconnaît un problème de saturation et de robustesse du réseau francilien, mais cela ne compromet pas le projet pour 4 allers-retours, puis 9-10 dans un second temps, voire plus au-delà de 2030 selon certains éléments du dossier « programme ». Mais, le projet est fondé sur les 4 allers-retours, ce qui fait que l’on ne peut pas apprécier la réalité de l’AFA.
  • Les nuisances sonores et vibratoires sont un réel souci. RFF n’a pas envisagé dans le DEPU de s’occuper desdites nuisances en Ile-de-France parce que 1/ elles existent déjà, 2/ historiquement, la région a toujours été traversée par des trains de fret, 3/ le matériel roulant de l’AFA sera plus moderne donc moins bruyant.
  • Le contournement n’étant pas l’objet de l’enquête, la commission d’enquête ne pourra pas répondre pleinement sur le sujet.
  • Enfin, le rapport de la commission d’enquête et son avis seront rendus le 3 septembre 2014. Ils seront consultables sur le site de la préfecture du Pas-de-Calais.

 

SOURCES
1. Le dossier d’enquête publique est consultable sur le site www.viia.fr, ainsi que sur le site www.pas-de-calais.gouv.fr.
2. Les principaux éléments du dossier d’enquête et le premier avis de PEE est consultable sous le lien suivant : http://portes-essonne-environnement.fr/lautoroute-ferroviaire-atlantique-passera-t-elle-par-la-ligne-du-rer-c/.

3. L’avis conjoint de PEE, IDFE, ENE et CAD en pdf : 2014-07-21 Avis AFA EP2 IDFE-ENE-CAD-PEE definitif.
4. Registre électronique en pdf de la deuxième enquête publique sur l’AFA, extrait du site internet www.pas-de-calais.gouv.fr : Observations au 23 juillet. L’avis conjoint de PEE figure en pages 98-103.
5. SNCF, 2013. Voyages au coeur de SNCF, mai 2013, 52 p. (SNCF_RA_BD).

© Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, 28 juillet 2014.

Autoroute ferroviaire Atlantique : la forte opposition du député-maire de Drancy, Jean-Christophe Lagarde

Dans le cadre de la première enquête publique sur le projet d’autoroute ferroviaire Atlantique (AFA) qui traverse la région francilienne via la ligne du RER-C (et notamment Étampes, Brétigny-sur-Orge, Juvisy-sur-Orge), PEE a adressé une copie de son avis au député-maire de Drancy, Jean-Christophe LAGARDE. Interviewé par le Parisien en mai 2014, il est apparu comme le chef de file de l’opposition des élus de la Seine-Saint-Denis à ce projet mettant en avant d’importants risques sanitaires, la légèreté et l’inconséquence du trio SNCF/VIIA/RFF qui consiste à faire passer de longs convois sur un réseau francilien saturé.

DES VILLES DU 93 MANIFESTENT LEUR OPPOSITION CLAIRE ET UNANIME

Le 13 juin 2014, Jean-Christophe LAGARDE a exprimé sa satisfaction de voir que l’association PEE avait émis un avis défavorable au projet d’AFA tel qu’il a été présenté au cours de la première enquête publique. Sa lettre était accompagnée d’un dossier comportant les délibérations des communes de Drancy, Rosny-sous-Bois et de Villepinte. Les observations sont quasi identiques :

  • opposition au passage de l’AFA avec des trains d’un kilomètre de long en zone urbaine dense,
  • refus de voir se multiplier les risques et les nuisances,
  • demande à l’État de contraindre la SNCF à s’orienter vers l’indispensable contournement  de l’Ile-de-France par l’est – voire par l’ouest, car la ligne de la Grande ceinture empruntée est déjà la ligne la plus saturée de France en terme de trafic de marchandises,
  • refus de voir transiter ou stationner en gare de Drancy des produits toxiques pouvant constituer une menace potentielle pour la vie de plusieurs dizaines de milliers de personnes alors que les riverains de cette gare de triage sont déjà fortement exposés à des « dangers mortels » en cas d’accident de wagons de produits chimiques.

Jean-Christophe LAGARDE précise que « RFF reconnaît que la robustesse du réseau ne permet pas d’accueillir en l’état » ces trains longs, de fort tonnage, que sont les convois d’autoroute ferroviaire. (1)

2014-06-13 JCL Drancy - PEE - AFA

Lettre du député-maire Jean-Christophe LAGARDE à PEE, 13 juin 2014, page 1. © PEE.

2014-06-13 JCL Drancy - PEE - AFA-1

Lettre du député-maire de Drancy à PEE, 13 juin 2014. © PEE.

EXIGER DE VIIA/SNCF/RFF UN CONTOURNEMENT DE LA RÉGION PARISIENNE

Alors que les rapports s’accumulent sur les preuves indiscutables du manque d’entretien des voies par le binome RFF/SNCF ainsi que l’obsolescence du réseau, la proposition de contourner l’Ile-de-France avancée par les élus de Seine-Saint-Denis est la meilleure solution afin d’éviter des catastrophes en chaîne et des dysfonctionnements supplémentaires pour les millions d’usagers franciliens. Ainsi, Jean-Christophe LAGARDE avance deux possibilités, sans entrer dans les détails :

  • un contournement par le nord « qui conduirait à désengorger le port du Havre en permettant au fret de partir vers le Nord et l’Est de l’Europe via Amiens, Tergnier et Chalons. »
  • un contournement par l’ouest, « en descendant ensuite par Alençon, le Mans et Tours ou encore réorienté vers le Luxembourg sur l’Autoroute ferroviaire existant qui va jusqu’à Perpignan. »

Il pourrait être avancé que certains secteurs ne sont pas encore électrifiés. Que les opérateurs profitent donc de ce projet pour les doter de l’électricité ! Ils l’ont bien fait lorsqu’ils ont réalisé les lignes TGV.

QUELLES SOLUTIONS POUR CE CONTOURNEMENT ?

Les citoyens ne doivent pas se substituer aux ingénieurs de la SNCF, de VIIA ou de RFF. Au cours d’une concertation normale et démocratique, une pluralité de projets aurait dû être soumise en amont de l’enquête publique aux maires, aux présidents d’agglomération, aux élus, aux riverains, aux Franciliens. Or, cela n’a pas été le cas ! Seules les communes de Tarnos et de Dourges ont eu droit à un véritable débat public en 2013. Que les opérateurs réamorcent donc la discussion autour des possibles contournements et du site de transbordement parisien sis au sud de la capitale sans aucune localisation détaillée dans le dossier d’enquête publique, excepté l’éventualité de Brétigny-sur-Orge dans le dossier de procédure de mise en concession !

D’ailleurs, au sujet de cette plateforme parisienne, il pourrait être rétorqué que l’Ile-de-France serait ainsi déchargée de milliers de camions en arrivant directement par le train. Il s’agit là d’un faux débat. Non seulement, c’est reporter dans un secteur probablement déjà saturé une masse de camions qui, en temps normal, ne seraient pas présents. Mais, en plus, cela occasionnerait des embouteillages supplémentaires, donc des émissions de gaz à effet de serre, dans une zone francilienne déjà sous l’emprise de la pollution de l’air ambiant par le trafic routier habituel. Le contraire des souhaits originels, à savoir la réduction des émissions de CO2 et le désengorgement du réseau routier, serait immanquable. Ce risque sanitaire potentiel doit être pris en considération par les pouvoirs publics. Conclusion, cette plateforme doit impérativement être envisagée en périphérie de l’Ile-de-France. (2)

LE DÉPUTÉ-MAIRE DE DRANCY SOLLICITE IDFE

Jean-Christophe LAGARDE a alerté Dominique DUVAL, nouvelle présidente d’Ile-de-France Environnement (IDFE), sur le projet soumis. Il lui a fait part de l’opposition des communes de la Seine-Saint-Denis concernées, mais également de l’opposition de PEE qui semble, alors, être une des rares associations de la région parisienne à avoir exprimé un avis défavorable.

Le coeur du problème ne réside pas dans le principe d’une autoroute ferroviaire, symbole d’une avancée en faveur de la protection de l’environnement. Le transport des semi-remorques routières sur rail a été impulsé par la loi Grenelle 1 d’août 2009 qui a inscrit au programme l’AFA, estimée alors à plus de 190 millions d’euros. Le 18 septembre 2013, Frédéric CUVILLIER, secrétaire d’État chargé des Transports, a également annoncé la création d’une autoroute ferroviaire reliant Calais au Boulou (au sud de Perpignan). La carte présentée mentionne d’autres projets, notamment une liaison Dijon – Paris par le sud-est francilien… (3)

Autoroutes ferroviaires francaises 2014

Carte des autoroutes ferroviaires françaises en service ou projetées, extraite du site internet du ministère du Développement durable, juillet 2014.

Qu’un maillage soit élaboré est une bonne chose. Mais, une véritable réflexion doit être conduite sur la promotion de ce report modal route/rail hors des zones urbaines denses. En leur temps, Lyon et Montpellier ont été contournées. Pourquoi pas le bassin francilien ? Selon Jean-Christophe LAGARDE, le contournement de la région parisienne « apporterait une réponse pertinente sur les longs trajets à la fois pour les marchandises dangereuses et pour les remorques des transporteurs routiers. » En ce sens, au regard de la fiabilité du réseau ferré parisien, il ne fait que mettre en avant le principe de précaution inscrit dans la Charte de l’environnement pour la population concernée, soit plus d’un million de Franciliens.

SOURCES
1. Lettre de Jean-Christophe LAGARDE, député-maire de Drancy, adressée à PEE, en date du 13 juin 2014. Délibérations des villes de Drancy, Villepinte et Rosny-sous-Bois. Dossier sous format pdf :  AFA DRANCY.
2. Voir le dossier d’enquête publique inséré dans l’article :
http://portes-essonne-environnement.fr/lautoroute-ferroviaire-atlantique-passera-t-elle-par-la-ligne-du-rer-c.
3. Voir le site du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, rubrique Transports, sous-rubrique Autoroutes ferroviaires, articles mis à jour le 28 avril 2014 :
http://www.developpement-durable.gouv.fr/Autoroutes-ferroviaires-une.html.

© Philippe TRENTY, Sylvie MONNIOTTE-MÉRIGOT, 11 juillet 2014.